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RDC : “Le jour où on m’a volé la victoire”, Martin Fayulu

Jamais journée ne lui aura paru aussi longue. Le 10 janvier 2019, le candidat de la coalition Lamuka attend des heures durant, convaincu que la commission électorale s’apprête à annoncer son élection. Mais rien ne se passe comme prévu.

Martin Fayulu, candidat Lamuka à la présidentielle de 2018 qui se considère toujours comme le président élu @Photo Droits tiers.

publié le 25 mai 2022 à 06:15:41

C’est le 10 janvier 2019, aux environs de 3 heures du matin, que le président de la commission électorale a annoncé les résultats de l’élection présidentielle. Mais ce jour-là avait débuté plus tôt, le mercredi 9 janvier à l’aube, par des heures et des heures d’attente.

Ce 9 janvier donc, je n’avais rien changé à mes habitudes : j’avais commencé par faire du sport. Il fut un temps où je marchais le long du fleuve, à deux pas de l’hôtel Faden House, transformé à l’époque en une sorte de quartier général de la coalition Lamuka. Comme la situation était très tendue, on m’avait conseillé de rester à l’intérieur de la parcelle. Je faisais des tours le long du mur d’enceinte, durant une heure, chaque jour.

L’élection avait eu lieu le 30 décembre 2018 et nous attendions que la Commission électorale nationale indépendante [Ceni] proclame les résultats. J’étais un peu fatigué : pendant la campagne, j’avais perdu 7 ou 8 kilos et, sur les photos, on voit que j’avais le visage très marqué. Mais, sincèrement, je n’étais pas stressé. J’étais confiant. Toute la ville bruissait pourtant de rumeurs. On craignait des manipulations, des tripatouillages.

L’UA s’est défilée

J’avais malgré tout bon espoir que le processus se déroulerait correctement. Le vote s’était bien passé, nous avions eu tout de suite des résultats officieux annonçant notre victoire, on savait que la Cenco [Conférence épiscopale nationale du Congo] et l’ECC [L’Église protestante] avaient placé des milliers d’observateurs [dans les bureaux de vote], et plusieurs signaux étaient positifs. En fait, depuis l’accord de Genève [portant sur une candidature commune de l’opposition], j’étais sûr qu’on allait gagner.

Les résultats étaient connus dès le 31 décembre à 9 heures. Le 1er janvier, un prêtre qui avait les chiffres de la Cenco, nous avait proposé une réunion avec Vital Kamerhe pour ressouder Lamuka mais, à l’heure convenue, Vital n’est pas venu.

Le 3 janvier, j’avais eu une réunion avec Corneille Nangaa, le président de la Ceni, Félix Tshisekedi, l’ancien président malien Dioncounda Traoré, chef de la mission électorale de l’Union africaine (UA), ainsi que des observateurs de plusieurs missions sous-régionales. Traoré avait dit à Nangaa qu’il savait qui avait gagné et que, si les résultats annoncés n’étaient pas les bons, il parlerait – il ne l’a finalement jamais fait, et je n’ai jamais compris pourquoi l’UA s’était défilée.

Déférence particulière

Le 4 janvier, je me suis entretenu avec Leïla Zerrougui, la patronne de la mission des Nations unies. Elle était très aimable et m’a proposé d’organiser une rencontre avec le président sortant, Joseph Kabila, ce que j’ai accepté. Le 6, j’ai traversé le fleuve pour Brazzaville car on m’a fait savoir que le président Denis Sassou Nguesso voulait me voir ainsi que mes concurrents Emmanuel Ramazani Shadary et Félix Tshisekedi. La rencontre s’est très bien déroulée. L’après-midi même, l’ambassadeur de France m’a invité à sa résidence. C’est quelque chose qui ne s’explique pas mais qui se ressent : on me traitait avec une déférence particulière, comme le futur président. Cela se passait bien.

Puis les rumeurs sont reparties de plus belle. On nous disait que le pouvoir trafiquait les résultats et, finalement, la rencontre avec Zerrougui et Kabila n’a jamais eu lieu, sans que l’on m’en donne la raison.

Odeur de roussi

Le 9 dans l’après-midi, la situation s’est encore tendue. J’étais à Faden House, que je n’avais pas quitté de la journée. J’étais dans mon bureau avec Ève Bazaïba, du Mouvement de libération du Congo (MLC, de Jean-Pierre Bemba), Pierre Lumbi, le secrétaire général d’Ensemble pour la République (de Moïse Katumbi) et Jean-Claude Mwalimu, mon directeur de cabinet.

On a appris que la presse était convoquée à la Ceni. C’était le signe que l’heure de la proclamation des résultats approchait. On a attendu, attendu… La télévision en bruit de fond, on grignotait, on discutait, c’était long.

Au milieu de la nuit, vers 1 heure du matin, Corneille Nangaa est apparu à la télévision, enfin ! Je me souviens que j’étais installé derrière mon bureau, le discours de victoire que j’avais préparé à côté de moi. Mais là, surprise ! Au lieu d’annoncer les résultats de la présidentielle, il a commencé par donner ceux des élections provinciales, ce qui était tout à fait anormal. Je me suis dit que ça sentait le roussi. Je savais que c’était à quitte ou double. Mais j’étais serein, vraiment. Je suis un fou de foot et je peux être hystérique quand mon équipe perd… ou gagne. Pourtant, lorsque l’heure est grave, je suis toujours très calme.

Silence de mort

Enfin, vers 3 heures du matin, est venu le tour de la présidentielle. Corneille Nangaa a annoncé la victoire de Félix Tshisekedi, on était estomaqués. On s’attendait à mon nom ou à celui d’Emmanuel Ramazani Shadary, le candidat de Kabila, en cas de tricherie, mais pas à cela. C’était la douche froide. Il y a eu un silence de mort dans le bureau. C’est Ève qui, la première, l’a rompu après de longues secondes, disant qu’il fallait continuer le combat.

Je suis descendu improviser un discours de défaite que je n’avais en rien préparé, puis je suis allé retrouver ma femme et me coucher dans mon appartement à Faden House. À l’aube, je suis allé à mon église prier Dieu.

Tiré de Jeune Afrique

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