Après le Rwanda, le peuple congolais peut désormais identifier les véritables tentacules de la guerre d’agression qui bouillonne encore dans les provinces du Kivu et de l’ancienne grande orientale. Paul Kagame n’est pas seul. Il gonfle bien les épaules à cause du soutien dont il bénéficie de ses parrains, ses complices et ses comparses regroupés au sein des associations délictueuses aux apparences trompeuses. C’est ce qui justifie en effet les impuissances lamentables du Conseil de sécurité vis-à-vis du minuscule Rwanda. En effet, toutes les résolutions prises ces trois dernières années sur la guerre en République démocratique du Congo n’ont comme dénominateur commun, l’incapacité intellectuelle, politique, technique et humaine de pointer Paul Kagame du doigt. Ainsi, des armes, des munitions, de la logistique et des ressources financières en quantité inestimable lui (Rwanda) sont fournies pour mener la guerre en RDC. Accusée devant la communauté internationale, Kigali a toujours menacé de trahir le secret en cas de tentative de le livrer aux Congolais. Coincés, les décideurs du monde ont choisi de porter leur croix jusqu’au bout. Soutenir Kagame et assumer une gestion trouble de la crise. Malgré les 600.000 déplacés de guerre exposés à la mort, l’ONU ferme les yeux et demande à la République démocratique du Congo de régler ses problèmes tout seul.

Négocier avec quel Rwanda ?

À bien analyser l’évolution du business de guerre tenu d’une main de fer par Paul Kagame dans les provinces juteuses de la RDC, il est une évidence que “l’EAC, l’UE et l’ONU jouent le jeu du Rwanda”. C’est ce qui expliquerait pourquoi toutes les rencontres, tous les sommets, tous les forums et conclaves du monde prennent soin, dans leurs résolutions conclusives, de ne pas faire mention de la barbarie rwandaise en RDC. Ainsi, négocier avec le M23, c’est parler avec le Rwanda ; discuter avec Paul Kagame, c’est aboutir aux mêmes revendications et aux mêmes propositions que le M23. L’EAC a démontré que seules les exigences du M23 sont à prendre au sérieux. Même les négociations de Nairobi entre groupes armés congolais furent espionnées par Kigali. Il en est de même des positions tardives des États-Unis d’Amérique et de l’Union européenne qui ont eu de la peine à condamner l’agression rwandaise. Voilà pourquoi, lors d’une émission politique la semaine dernière sur Radio Okapi, le député Juvénal Munubo était d’une fermeté robuste : Pas de négociation entre le gouvernement de la RDC et le M23. Je l’ai dit clairement hier soir dans l’émission Dialogue entre Congolais (DEC) de Radio Okapi. “Nous devons organiser la légitime défense et continuer à exiger des sanctions et isolement diplomatique du Rwanda”, a-t-il souligné. Pourtant, la Communauté des États de l’Afrique de l’Est, elle, ne travaille que pour la cause du Rwanda. “L’EAC est en RDC pour forcer le président Félix Tshisekedi à négocier. Tiens-le-toi pour dit ! Suivez avec intérêt la déclaration du chef de la délégation du Conseil de sécurité à Goma”, réagit un professeur d’université de Kinshasa. Le panafricaniste Kikala juge les autorités congolaises de naïves en cherchant à compter sur une communauté internationale. “Les autorités congolaises sont tellement naïves qu’elles continuent de croire que la France ou les USA sanctionneront celui qui les a aidés à affaiblir certains dirigeants africains pour leurs intérêts. Quelle perte de temps et d’énergie”, regrette-t-il.

L’ONU, une instance gérée par des hommes d’affaires

Le journaliste et écrivain, Freddy Mulumba Kabuayi, invité de l’émission “Ça fait débat” sur Télé 50, le vendredi 10 mars dernier, a littéralement critiqué l’élite congolaise qui ne veut pas se mettre au niveau des enjeux du pays. “Il faut comprendre une chose, depuis Kofi Annan (ancien secrétaire de l’ONU), l’ONU n’est plus dirigée par des États. Ce sont des affairistes qui dirigent l’ONU et ces gens ne pensent que affaires”, a-t-il fait comprendre répondant à une question sur le positionnement de la RDC dans le concert des nations. Pour la figure emblématique du combat contre la balkanisation, l’élite congolaise actuelle constitue un gros handicap dans la guerre que mène le pays contre un système international impitoyable et qui tient à asphyxier la RDC pour profiter de ses richesses. “L’élite congolaise doit comprendre que nous sommes une force. Nous avons tout ce dont le monde a besoin pour son avenir (minerais stratégiques, l’eau et consorts). Il nous faut une stratégie politique nationale. Nous avons tout intérêt, d’abord, à changer cette élite qui n’est pas au niveau des enjeux. Ça doit partir de là”, a-t-il indiqué. L’ancien DGA de la RTNC soutient mordicus que Félix Tshisekedi est à sa place dans cette guerre face aux impérialistes. Dans cet entretien, Freddy Mulumba croit que le pas franchi dans la dénonciation était à la hauteur du danger. “Nous avons aujourd’hui une chance d’avoir Félix Tshisekedi, un président de la République qui est clair et qui déclare dans toutes les tribunes que la RDC n’est pas à “balkaniser”. Il est très clair là-dessus. Mais, est-ce que cette élite l’accompagne ? Dernièrement, je crois devant les ambassadeurs, il avait déclaré que la RDC n’était pas un pays de peuplement. Qui a expliqué cela à notre peuple, majorité, opposition, voire la société civile ? Les médias aujourd’hui ne parlent pas assez de vrais enjeux de la RDC. Il n’y a pas assez de débats médiatiques sur les enjeux de la RDC (…)”, a-t-il déploré.

Cette stratégie politique nationale devrait permettre de résoudre plusieurs problèmes dont celui des conflits fonciers dans le Masisi, par exemple, qui opposent des personnes qui se sont attribuées des terres, lesquelles sont aussi sous la coupe de Kigali. Elles soutiennent les différentes rébellions (RCD, CNDP ou le M23) sous prétexte de défendre les tutsi, a-t-il justifié. Point de vue qui ne s’éloigne pas de cette réaction tout aussi directe de l’expert en communication Freddy Tshiyoyo qui s’oppose farouchement à la lecture des membres du Conseil de sécurité des Nations Unies. “Vraiment, c’est décevant. Une véritable douche froide. S’il faut suivre ce schéma (négociations avec le M23/Rwanda), c’est nous ramener à la case départ (comme en 2013) avec le système de brassage et mixage qui n’a pas apporté la paix pérenne tant souhaitée. Cette méthode a échoué”.