Cimetière, le métier de fossoyeur nourrit des jeunes congolais
Leur métier intrigue, effraie et parfois dérange. Les fossoyeurs, ces travailleurs des cimetières veillent sur les morts et bâtissent des mémoires dans la pierre et la terre. À Mingadi, l’un des plus grands cimetières de la province du Kongo central, ces travailleurs de l’ombre sont souvent accusés de « violation de sépultures », de « vol de dents », mais aussi de « revente de pièces » prélevées sur des cercueils. Des accusations que les personnes soupçonnées ont rejetées au micro d’Ouragan, lors d’une immersion dans la contrée.
Par Patrick Mputu
Les fossoyeurs du cimetière de Mingadi 1, dans la province du Kongo central, aménagent une sépulture quelques minutes après l’enterrement du défunt, en présence d’un membre de la famille éplorée @Photo Ouragan.
publié le 7 janvier 2025 à 06:06:00
En racontant leur quotidien fait d’efforts physiques, de traditions et d’un sens profond du devoir, les enterreurs ont avoué que certains forfaits ne se commettent plus. « Les histoires de voler les cercueils ou les cadavres ? C’est fini ! », témoigne André, un quadragénaire, au regard de son expérience dans le métier dont le début remonte à 1998.
Aujourd’hui, la priorité de ces ensevelisseurs est de protéger les tombes contre les affres du temps et des conflits. Les bagarres qui éclatent parfois dans les cimetières à cause des faits décriés ci-dessus, provoquent des dégâts voire sur les dalles. Pour y remédier, ils utilisent des méthodes pratiques : inscrire en grands caractères les noms des défunts et les peindre en noir. « Même si la tombe se casse, les inscriptions restent lisibles », explique l’un d’eux, pinceau à la main.
Toutefois, la préservation va au-delà des écritures. Les fossoyeurs insistent auprès des familles éplorées de construire des pierres tombales solides et identifiables. « Quand les familles attendent des années avant de revenir visiter les défunts, il est souvent difficile de retrouver la tombe sans un repère durable comme une photo ou une dalle renforcée », raconte-t-il.
– Une cadence parfois épuisante –
À Mingadi, près de Kinshasa, le travail ne manque pas. Ces braves ne chôment pas, d’autant plus que la majorité des corps à enterrer proviennent de la capitale. « Les bons jours, on enterre une dizaine de corps, parfois plus », confie Chadrack, 25 ans, essuyant la sueur de son front. Mais aujourd’hui, ils en sont à quatre enterrements alors qu’il est déjà 15 heures. « C’est une mauvaise journée », glisse-t-il, un brin déçu.
Ils fonctionnent par équipes, chacun ayant un rôle bien défini. Certains creusent, d’autres aménagent les fosses ou construisent les dalles. Pendant la pause, les collègues se rassemblent autour d’un verre. « Ceux que vous voyez là-bas sur la terrasse d’à côté, ce sont aussi nos collègues. C’est leur temps de repos », précise Pascal Nsimba, l’un des vétérans. Malgré l’apparente décontraction, la tâche exige discipline et endurance. « Les jeunes sont là pour nous épauler, surtout dans les travaux plus lourds. Parfois, si je suis occupé, j’envoie de l’argent pour qu’ils commencent à creuser. Je viens ensuite vérifier que tout est bien fait », explique-t-il.
– Des revenus à partager –
Creuser une tombe, construire une dalle, ou même décorer une sépulture à un prix. Le tarif de base, c’est deux casiers de bière, soit 20 dollars (selon le taux de change). Mais tout dépend des demandes spécifiques des familles endeuillées. « Pour une tombe avec des carreaux, ça peut aller jusqu’à 200 dollars. On se met d’accord à l’avance pour répartir les gains entre nous », spécifie Matone, propriétaire d’un lopin de terre où on peut encore creuser des sépultures. Ce travail, bien que modeste, leur permet de subvenir aux besoins de leur famille. « On paye les frais scolaires de nos enfants, on paye le loyer, et on assure la bouffe à nos familles », assure-t-il.
– Vivre dans l’ombre des morts –
Leur quotidien est marqué par des conditions précaires. « On dort à Mingadi, un quartier sans électricité », raconte Nzuzi, un jeune turc, à peine 23 ans, insouciant des risques sanitaires. « Les corps ont parfois leurs caprices, mais ce n’est pas ce qui nous rend malades. Ce métier, c’est notre quotidien, on y est habitués ».
– Respect des coutumes –
Travailler dans un cimetière, c’est aussi composer avec les traditions et les croyances. « Nous sommes majoritairement du Kongo central, mais nous travaillons avec des Luba et d’autres ethnies », précise un chef d’équipe. Chaque cérémonie suit les rites spécifiques de la province. « Quand tu es ici, tu danses au rythme de cette contrée. Si tu fais autrement, tu es perdu ». Les fossoyeurs veillent à respecter ces coutumes, tout en introduisant des pratiques modernes pour simplifier le travail et garantir un résultat durable.
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