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Guerre du sucre, le FPI reconquiert le Kivu pour l’ex-Kiliba

À l’image des troupes de l’EAC ou de la SADC incapables de lancer la moindre offensive, la firme tanzanienne Nansoro Super Group of Companies, pourtant leader régional dans la production du sucre, a tellement traîné pour injecter des fonds à travers sa filiale Nansoro qui a manifesté l’intérêt de reprendre la Sucrerie de Kiliba que la Première ministre, Judith Suminwa Tuluka, a opté pour les moyens domestiques.

Par Pold Levi Maweja

La Success de Kivu renaît de ses cendres grâce au Fonds de promotion de l’industrie @Photo Droits tiers.

publié le 21 décembre 2024 à 17:49:00

Le Fonds de promotion de l’industrie (FPI) a, en effet, versé environ 5,9 millions $US dont un crédit de 3 000 000 $US et une subvention en deux tranches de 1 650 000 $US et 1 235 313 $US reçues en novembre 2024 à la désormais sucrerie du Kivu (Suki). Le ministre de l’Industrie et du développement des petites et moyennes entreprises (PME) et Petites et moyennes industries, Louis Watum Kabamba peut bien se frotter les mains. Après vingt-six ans de marasme, l’ex-Sucrerie de Kiliba redonne espoir dans tout Sud-Kivu, face à un quotidien devenu amer suite à l’instabilité sécuritaire fomentée depuis les pays voisins. Plus de 1400 emplois directs sauvés du sempiternel congé technique et sevrés de salaires, Suki compte porter ses effectifs à court terme à 2500 travailleurs, priorité à la jeunesse du Sud-Kivu.

– Filières d’approvisionnement extérieurs –

Et nul doute, des centaines d’emplois indirects et la relance des activités connexes qui auront pour effet d’épargner des jeunes des filets de recruteurs des groupes armés. Suki compte atteindre sa production d’antan à moyen terme, soit autour de 19 000 t de sucre l’an. Et, cerise sur le gâteau, comme la Judith biblique qui a décapité le tyran babylonien Holopherne, Suminwa a coupé et bouché filières et ramifications des exportations des sucres de pays voisins, singulièrement le Kibuye Sugar rwandais. Et à une certaine proportion, la Société sucrière de Moso (SOSUMO) du Burundi ou encore les trafiquants « officieux » tanzaniens. Tenez, en 2021, la consommation du sucre blanc raffiné et brun d’usine, sur l’espace COMESA, avait été estimée à 1 067 099 t. Il s’est posé un gap de 210 163 t pour lequel un quota a été attribué à chaque État membre pour le combler. Le Rwanda a eu droit à 4 072,60 t et la RDC moins de 6 t, tout juste 5,91t. Bizarrement, cette année-là, la Sucrerie de Kiliba qui avait repris à ronronner timidement s’éteint derechef, sans raison valable. La vérité est qu’il fallait un débouché sûr pour le sucre rwandais, donc les Nord-Kivu et Sud-Kivu, le Maniema, le Tanganyika et un gros pan du Grand Kasaï. Au Rwanda, la principale usine sucrière établie à Kibuye, propriété de Raï Group, vise une production d’au moins 50 000 t en 2024, améliorant ainsi de 150% son offre en 5 ans.

Par ailleurs, le groupe mauricien Madhvani envisageait d’investir 300 millions $US pour la construction d’une sucrière capable de produire au moins 160 000 t l’an avec des champs de 10 000 hectares à Ndego et Kabare dans le district de Kayonza et Nasho dans le district Kirehe. Les recettes d’exportation des produits agro-industriels rwandais notamment le sucre ont été de 789 millions $US en 2023, en augmentation de 45% par rapport à 2022. Kigali vise les 1 milliard $US, au bas mot, à fin 2024, grâce au marché de l’est congolais. Il va falloir au gouvernement de Kagame de revoir largement à la baisse ses ambitions à propos, à présent que Judith Suminwa a ressuscité la sucrerie de Kiliba.

– Kiliba avait goût amer pour tous les premiers, avant elle –

Que ce ne fut pas facile ! Judith Suminwa a dû faire preuve de virilité là où, depuis pratiquement 15 ans, ses prédécesseurs – tous hommes- qui ont tenté de relancer la sucrerie ont, de manière lamentable, jeté l’éponge. Dans le cadre de la réforme des entreprises du portefeuille menée par le Comité de pilotage de la réforme des entreprises publiques (COPIREP), la Sucrerie de Kiliba, dont les activités étaient tombées en marasme depuis 2008, a été liquidée en 2011 ainsi que celle de Lotokila, dans l’ex-province Orientale. En 2009 déjà, sous Adolphe Muzito, le gouvernement par le biais du ministère de l’Agriculture conclut un partenariat public-privé, avec Kotecha et Sucraf. Un projet de création d’une pépinière de 200 hectares de cannes à sucre en vue d’une mise en production endéans 24 mois, a-t-on appris. Mais suite à un malentendu non élucidé à ce jour, le gouvernement et ses associés se séparèrent.

Officiellement, les actionnaires Kotecha et Sucraf n’ont pas pu disposer des fonds nécessaires pour la relance de la Sucrerie de Kiliba. L’État n’aura alors plus d’autres solutions que d’engager une procédure de dissolution et de liquidation de la société dénommée alors « Office national du sucre » dans l’espoir de trouver un repreneur à la sucrerie. En vain.

Du temps de Matata, entre 2012 et 2013, l’on assiste à une guerre des nerfs entre le gouvernement congolais et le Tanzanien Super Group, ce dernier accusant la RDC de ne pas apporter sa part de financement pour la relance de la Sucrerie de Kiliba, débaptisée depuis « Sucrerie du Kivu ». Toutefois, le groupe tanzanien a entrepris à ses frais la réhabilitation de la sucrerie avec les travaux de mise en place d’une nouvelle pépinière de 350 hectares de cannes à sucre importées de Kagera Sugar en Tanzanie. Et en revanche, elle reprend non seulement 51% des parts de la Sucrerie. Auparavant, l’État détenait 80% d’actions. Pis, la société tanzanienne ne réembauche que moins de 10 % des effectifs de la Sucrerie de Kiliba, soit 250 sur les 3 000 agents répertoriés en 2008.

Les Tanzaniens reprennent aussi le patrimoine immobilier de la Sucrerie de Kiliba, dont des villas desquelles sont déguerpis des anciens cadres. A l’instar de la Société nationale des chemins de fer du Congo (SNCC), la sucrerie jouissait du monopole de la production et de la commercialisation du sucre dans le Kivu, le Katanga et les deux ex-Kasaï oriental et occidental. Mais la nouvelle acquéreuse de la sucrerie ne saura pas atteindre son objectif de produire le premier sachet de sucre en 2014, après 6 ans de fermeture. Pourtant en 2017, quelque 888 772 508 FC ont été prévus, dans la loi de finances publiques pour la réhabilitation de la sucrerie, mais aucun rond n’a été décaissé.

En 2018, de passage à Uvira, Bruno Tshibala Nzenzhe, le 1er ministre, promet de relancer l’usine, question de redorer l’image de l’État après un chapelet des promesses non tenues, près de 10 ans après la décision de l’État de se désengager de la sucrerie. Dans le cadre de l’exercice budgétaire 2018, le ministère du Portefeuille a quand même obtenu 11 000 000 000 FC sur les 27 249 312 501 FC sollicités pour faire à nouveau ronronner l’usine sucrière de Kiliba. Rien ne se fait. Bien avant ces tentatives répétées et sans succès d’une relance sur ressources propres de l’État, des privés ont tenté de reprendre la Sucrerie mais se sont heurtés aux chinoiseries administratives du pouvoir public. Mi-août 2018, en marge des Jeux de la jeunesse des Grands lacs, le 1er ministre a fait le déplacement de l’ex-Sucrerie de Kiliba. L’État y est devenu actionnaire minoritaire avec 49 %, contre 80 %, il y a dix ans. La désormais Sucrerie du Kivu projette pour début 2020 sa première production estimée à des dizaines de milliers de tonnes depuis sa relance et espère pouvoir créer jusqu’à 7 200 emplois.

Mais, pour ce faire, les employés congolais de la sucrerie tenue à 51 % par le tanzanien Sansoro, ont sollicité non seulement la sécurisation des installations de la sucrerie mais surtout la réadmission de leur société au budget d’intervention économique de l’État. Bruno Tshibala a promis de traiter avec diligence la demande de cette entreprise, jadis fleuron de l’économie du Grand Kivu dont la renaissance permettrait de lutter par les emplois contre les groupes armés qui écument la région. Quand Sylvestre Ilunga Ilunkamba le remplace à la primature, la sucrerie semble se relever de sa tétraplégie. Mais l’État congolais n’avait guère pris en compte les enjeux mondiaux du sucre. À l’Union européenne, l’Italie est accusée d’introduire de manière frauduleuse, 130 000 t de sucre l’an. Sur le continent, le Kenya joue au protectionnisme. La guerre du sucre fait rage. Créée en 1956 par le baron belge Kronacker, la superficie du domaine de la Sucrerie du Kivu est de 7 618 hectares, dont la majeure partie est marécageuse. La production annuelle de la sucrerie se situait entre 15 000 et 19 000 tonnes. La production a nettement chuté à 900 t, quand les sucreries des autres pays montaient en production, au milieu des années 1990 du fait de l’insécurité liée à la guerre d’agression qui a abouti à la prise du pouvoir par l’Alliance des forces démocratiques pour la libération (AFDL) en 1997.

Située à quelques encablures de la ville d’Uvira, au Sud-Kivu, la Sucrerie a longtemps tenu la position dominante sur le marché régional du sucre. La production mondiale de sucre devrait atteindre 186,6 millions de tonnes en 2024/2025, selon le rapport, publié début novembre 2024, du Département américain de l’agriculture (USDA). Ce volume représente une hausse de 1,5 %, soit une augmentation de 2,8 millions de tonnes par rapport à la campagne précédente. L’Inde, la Chine et la Thaïlande dominent le peloton de tête avec environ 30 % de la production mondiale de sucre. Sur le continent, l’Égypte et l’Afrique du Sud, respectivement 1ᵉʳ et 2e producteurs africains, réaliseront respectivement 2,6 millions de tonnes, et 2 millions de tonnes, soit une baisse de 3 % en 2024/2025, soit 67 000 tonnes de moins que la campagne précédente.

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