Alors que l’attention de tous les Congolais est tournée vers l’est du pays où les rebelles du M23, appuyés par l’armée rwandaise, continuent à faire la guerre, en tuant des milliers de compatriotes, malgré la signature d’un Accord de cessez-le-feu à Luanda (Angola) entre Kinshasa et Kigali, c’est le moment que choisit l’ancien Premier ministre, Augustin Matata Ponyo, pour s’attaquer aux actions menées par le gouvernement, particulièrement celles initiées par le chef de l’Etat, Félix-Antoine Tshisekedi.
En effet, depuis quelques semaines, Augustin Matata a mis en branle son « armée numérique », pour tirer à boulets rouges sur les mesures prises par le chef de l’Etat, par l’entremise du ministère de l’Economie nationale, contre le vie chère en République démocratique du Congo (RDC). A travers celles-ci, Félix Tshisekedi s’est résolument engagé à restaurer le pouvoir d’achat de ses compatriotes.
Pour rappeler à cette bande de mafieux économiques au passé peu élogieux, il sied de leur énumérer quelques mesures suivantes que les Congolais applaudissent déjà. Il s’agit
notamment des mesures fiscales et parafiscales qui portent sur la suppression de tous les
droits, taxes et redevances sur le maïs et la farine de maïs. Pour les autres produits, il s’agit d’un total de 24 actes, au total, dont certains sont carrément supprimées, d’autres réduits de
5%, 25% et 50%.
Il est aussi question de réguler le marché intérieur, surveiller et contrôler les prix. Il s’agit pour le ministère de l’Economie, selon l’instruction du chef de l’Etat, de procéder à l’évaluation et à la certification sur des procès-verbaux de stocks existants et en cours ayant traversé les frontières, relever les prix en vigueur avant la mise en œuvre des mesures, contrôler le taux de change appliqués par les gros importateurs… Il s’agit enfin de procéder à la suppression des barrières illicites qui impactent sur le prix des biens de consommation de première nécessité, de la révision de l’ordonnance-loi organique fixant la nomenclature des droits, taxes et redevances du pouvoir central et la mise en place d’une perception unique de toutes les taxes. Nous ne donnerons pas
l’occasion de laisser libre court à ces personnages qui ne sont pas des modèles pour leur
énumérer la litanie de mesures prises qu’ils ne sont sensés ignorer.
– Des prédateurs à l’affût –
Toutefois, nous rappelons à l’opinion nationale qu’alors que ces mesures sont attendues à
bras ouverts par la population congolaise, il se peut, alors malheureusement, qu’une certaine caste de prédateurs de l’économie congolaise qui ont déjà prouvé leurs limites dans la
gestion passée de la res publica, trouve ce moment pour faire fonctionner leurs officines, montant des stratagèmes allant dans le sens de faire croire à l’opinion que ces mesures
n’auront aucun impact sur le social des Congolais. A lire les attaques venant des lieutenants de l’ancien Premier ministre, les esprits éveillés se posent une seule question : Augustin Matata a-t-il des leçons de gestion à donner aux gens ?
La réponse est sûrement NON. Ancien Premier ministre, Augustin Matata est connu pour sa versatilité politique et pour avoir défendu une thèse qui avait fait démissionner l’éminent
professeur Mabi Mulumba de ses fonctions de directeur de l’Ecole doctorale de l’Université protestante du Congo (UPC) pour ne pas cautionner la tricherie ; le
détournement considéré présumé jusqu’à ce jour, ne lui offre pas cette carrure de regarder les Congolais en face. Ceux-ci lui exigent des comptes sur l’argent décaissé en faveur du projet Bukanga-Lonzo, à ce jour éléphant blanc. Nous n’allons pas, quant à nous, remuer le couteau dans la plaie des Congolais encore béate pour leur rappeler le projet de construction des bateaux dont un seul n’avait navigué que deux à trois fois sous son règne. Que de cadavres dans les placards laissés par celui qui veut, à ce jour, donner des leçons au gouvernement actuel ?
– Attaquer Fatshi par Mukoko interposé –
Ne pouvant pas directement et physiquement s’attaquer au chef de l’Etat, c’est vers le vice-
Premier ministre, ministre de l’Economie nationale, Daniel Mukoko Samba, que les membres de « l’armée numérique » de l’ancien Premier ministre ont tourné leurs armes. Primo, pour son honneur, Augustin Matata devrait se cabrer dans un petit coin pour avoir obtenu un diplôme de « Docteur en économie », après avoir défendu une thèse qui avait fait couler beaucoup d’eaux sous les ponts. C’est pourquoi, dans sa lettre de démission comme directeur de l’Ecole doctorale de l’UPC, le professeur Mabi Mulumba avait évoqué « des irrégularités ayant émaillé le processus conduisant à la défense de la thèse d’Augustin Matata Ponyo ». Parmi ces irrégularités relevées dans la démarche conduisant à la défense de la thèse de ce doctorat inouïe, Evariste Mabi Mulumba a noté que « légalement, la durée conduisant à l’obtention du diplôme de doctorat est de trois ans minimum et de cinq ans maximum, à compter de la date d’obtention du diplôme de DEA ».
Dans la foulée, il a rappelé que « le doctorant Augustin Matata avait obtenu son diplôme de DEA en janvier 2016 et a défendu sa thèse en février 2018 ». Moralité : sur le plan scientifique, ce diplôme de doctorat devrait
être annulé, car reposant sur la fraude et du faux, selon le professeur Mabi Mulumba. C’est
ce qu’on appelle depuis un certain temps, « diplôme politiquement accordé ». Triste !
– Pas de leçons à donner sur le plan politique –
Sur le plan politique, l’ancien Premier ministre n’a pas, non plus, des leçons à donner à quiconque. Candidat président de la République en 2023, il était le premier à rallier l’ex-gouverneur du Katanga, Moïse Katumbi avant de jeter l’éponge. Après les élections, il l’a subitement renié pour se tourner vers Félix Tshisekedi. Comme dans ses habitudes après chaque défaite, non content d’avoir trouvé son compte auprès du chef de l’Etat, il lui a encore tourné le dos, en lui collant les noms de tous les oiseaux pendant la campagne électorale. Et depuis quelques semaines, il tente de se rapprocher de Martin Fayulu qui réclame la tenue d’un dialogue entre les acteurs politiques congolais. Sûrement que dans
sa tête, Augustin Matata Ponyo pense déjà au partage des postes.
D’après des observateurs de la scène politique congolaise, Matata Ponyo vilipende les actions de Félix Tshisekedi pour n’avoir pas obtenu un poste ministériel, après avoir été consulté par Augustin Kabuya, alors Informateur nommé par le chef de l’Etat.
Selon diverses sources, l’homme à la cravate rouge lorgnait soit la Primature, soit une vice-Primature à caractère économique. L’ayant bien compris comme « caméléon politique », le chef de l’Etat a éconduit l’homme de Kindu, dont on dit changer de couleur au gré de ses intérêts. Ancien Premier ministre, Matata Ponyo est parti de la Primature, laissant des cadavres dans des tiroirs. Ici, deux dossiers lui colleront à la peau. Ainsi, en avril 2015, MEDIAPART, un média français, publiait un dossier qu’il avait qualifié des « Affaires suspectes » de Matata Ponyo. Voici ce qu’écrivait MEDIAPART : « … Augustin Matata Ponyo n’est pas bien vu dans le peuple. Il aurait certaines mauvaises affaires à se reprocher. Les Congolais parlent
de plusieurs faits condamnables, en relation avec la dilapidation des deniers publics. Quelques cas emblématiques reviennent souvent dans les discussions. Ainsi de l’affaire du gros contrat de bus. Un marché passé sans suivre le cheminement ordinaire d’un marché public et qui a généré une commission de 20 millions de dollars que les intéressés se seraient partagée. Le maître de ce stratagème était l’ancien ministre délégué aux Finances, limogé depuis. C’est lui qui s’occupait des montages financiers mais aussi de la répartition des gains.
Les chemins de fer n’ont pas non plus échappé à la voracité du Premier ministre. Un grand marché d’acquisition de locomotives, financé par des institutions financières
internationales, défraie la chronique puisque les Congolais n’ont rien vu, sur le plan de
l’amélioration des services ferroviaires. Les institutions internationales qui ont contribué au projet auraient lancé une enquête. Dans une autre affaire encore, le Premier ministre qui avait programmé la construction de 1000 écoles, un gros budget, n’en a réalisé que 400. Le marché passé de gré à gré, comme celui des bus d’ailleurs, a, là aussi, laissé au passage une commission de 20%. Mais comme dans toutes les affaires de ce genre, la présence d’un intermédiaire est obligatoire, on parle de la femme du Premier ministre. C’est elle qui interviendrait auprès de son mari en faveur de ceux qui cherchent à fructifier leurs affaires sur le dos du contribuable. C’est un cas sur lequel il faudrait bien revenir un jour, pour voir quel rôle joue cette femme au juste.
Ces affaires ne sont probablement rien à côté de la retenue des redevances minières.
Augustin Matata Ponyo a été accusé d’avoir oublié de reverser 15% aux provinces et 25% aux territoires d’exploitation des recettes minières, ainsi que le stipule le code minier. Les représentants des régions s’étaient plaints au président de la République qui avait envoyé une lettre au Premier ministre. Ce dernier avait déclaré que cette procédure prenait du temps. Les régions attendent toujours ».
– Défendre ses intérêts personnels –
En réalité et selon certaines indiscrétions, la « guerre » que mène Augustin Matata Ponyo et
son équipe contre le vice-Premier ministre, ministre de l’Economie nationale a comme fondement un problème d’intérêt personnel. A en croire des informations reçues de la DGDA, l’ancien Premier ministre est furieux parce que les mesures prises par le chef de
l’Etat toucheraient directement à ses intérêts personnels mijotés avec son cercle restreint lors de son passage sur l’avenue Roi Baudouin. Il s’agirait, entre autres, de certaines taxes, dont l’AUFS, qui viennent d’être supprimées. Au niveau de la DGDA, il nous revient d’apprendre que Mapon continuerait à bénéficier de colossales sommes d’argent sur cette dernière taxe en vue de se refaire une santé financière. Comme si ce qu’il avait amassé lors de son passage à l’exécutif national ne lui avait pas suffi.
Comme on peut le constater et que l’opinion n’étant pas dupe, le combat de l’homme à la cravate rouge contre les mesures prises par le président de la République se résume en deux motivations.
Primo : pour n’avoir pas obtenu un poste ministériel, il a mis à contribution son « armée numérique » pour tirer sur tout ce qui bouge. Secundo : il doit regretter le fait qu’on lui ait retiré le beefsteak de la bouche en supprimant certaines taxes dont l’argent alimente l’armée numérique pour nuire à la vie de plus de 100 millions d’âmes.
Et là, il ne combat pas Félix-Antoine Tshisekedi, ni Judith Suminwa, moins encore Daniel
Mukoko Samba, mais il est sur les dents contre la vie de Congolais. C’est connu !
Jean-Pierre Katata
Politologue