Maria Ntumba : la justice a-t-elle créé une icône numérique ?
L’arrestation choc de Maria Ntumba par les autorités judiciaires congolaises a eu un effet inattendu : au lieu de diminuer son influence, elle a propulsé cette jeune femme au rang d’icône numérique. En cherchant à faire respecter la loi, les autorités ont, sans le vouloir, rehaussé son image, la faisant rayonner bien au-delà des frontières congolaises.
Par Grady Mugisho
Maria Ntumba, de la bouche trouée en icône numérique @Photo Droits tiers.
publié le 1 octobre 2024 à 04:50:00
Certaines arrestations vont au-delà du simple cadre légal. Ce n’est pas tant la nature de l’infraction qui importe, mais l’impact médiatique qui en découle, transformant l’événement en un moment mémorable. Maria Ntumba n’était jusqu’alors qu’une simple influenceuse parmi tant d’autres dans le paysage vibrant des réseaux sociaux congolais, captivant des milliers d’abonnés par ses opinions audacieuses.
Pourtant, un acte judiciaire relayé sans relâche sur les réseaux a métamorphosé cette influenceuse en un symbole. Un symbole d’un combat subtil entre la liberté d’expression propre à l’univers numérique et la tendance répressive d’un État qui peine à saisir les enjeux du monde digital. Il est fascinant de voir comment, en tentant de réduire au silence cette voix montante, la justice congolaise a, en réalité, offert à Maria Ntumba une visibilité sur la scène internationale. Ce paradoxe cruel met en lumière le choc entre la répression étatique et la puissance virale des réseaux sociaux, transformant ce qui devait être une répression en un acte de célébration.
Depuis cette arrestation, marquée par une brutalité inutilement théâtrale, de nombreuses figures publiques, écrivains et observateurs, se sont mobilisés pour dénoncer ce qu’ils perçoivent comme une dérive autoritaire et une humiliation criante. L’écrivain congolais, Alain Mabanckou, par exemple, considère ce procès comme un triste reflet de l’incapacité de la justice congolaise à saisir les enjeux de l’écosystème numérique. “En l’arrêtant de façon aussi publique et spectaculaire, la justice de la RDC est en train de donner non seulement une stature internationale à la Tiktokeuse Maria Ntumba, mais aussi le statut de grand martyr des réseaux sociaux du continent africain. Des privilèges qui ne pourront que la conforter dans son entreprise”, déclare-t-il avec une certaine amertume sur Facebook.
D’ailleurs, les chiffres parlent d’eux-mêmes : depuis son arrestation, la communauté de Maria Ntumba a connu une croissance exponentielle, soutenue par ceux qui voient en son combat une forme de résistance à l’autorité.
Cependant, cette situation soulève une question fondamentale. Que révèle cet épisode sur les relations entre le pouvoir politique, la justice et les réseaux sociaux en Afrique ? Dans un monde où chaque citoyen, armé d’un smartphone et d’une connexion internet, peut devenir le porte-parole de diverses revendications, jusqu’où un État est-il prêt à aller pour contrôler cet espace de liberté ? Et à quel prix ? On peut redouter que la stratégie répressive de la justice congolaise ne se retourne finalement contre elle.
En cherchant à restreindre l’influence de Maria Ntumba, elle pourrait avoir provoqué l’effet inverse, renforçant ainsi sa position de leader d’opinion. Dans une Afrique où les jeunes, souvent ignorés, cherchent des plateformes pour exprimer leur mécontentement face aux inégalités et à l’autoritarisme, les réseaux sociaux apparaissent ainsi comme un véritable espace d’émancipation.
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