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Julie Grimoud : “réécrire ce texte pour la scène m’a rapprochée de mes parents”

Moins d’une année après la publication de son excellent livre Parallèles, la metteuse en scène a ressenti le besoin de l’adapter en pièce de théâtre. Une idée qui s’est imposée au vu de la forme poétique et théâtrale de l’ouvrage. En effet, Julie Grimoud présentera, le 5 octobre au centre culturel Ntongo Elamu, à Bandalungwa, la première partie de ce travail. À quelques jours de la représentation, l’écrivaine nous dévoile les défis et les émotions qui l’ont marquée durant la réécriture du livre.

Par Grady Mugisho

La représentation de Parallèles aura lieu le 5 octobre au centre culturel Ntongo Elamu, à Bandal @Photo David Shongo.

publié le 1 octobre 2024 à 04:25:00

À travers cette démarche, Grimoud explore des souvenirs familiaux et revisite des mémoires collectives entre la France et le Congo. Durant ce voyage introspectif, la comédienne et metteuse en scène sera accompagnée par les rythmes ancestraux du musicien Taluyobisa, la sensibilité photographique de Samuel Mwami, et l’expertise technique de Junior, révélant toute la richesse des ponts tissés entre ses racines et celles du Congo.

Pouvez-vous nous dire ce qui vous a poussé à vouloir adapter “Parallèles” en pièce de théâtre ?

Je n’avais pas envisagé d’écrire pour le théâtre au départ. Cependant, durant l’écriture, le récit du voyage a été interrompu par des voix. Cela donnait parfois l’impression d’une forme poétique, et parfois théâtrale. La dimension théâtrale, notamment à travers les adresses à certaines personnes, comme mon père ou ma mère, était présente dès le début. C’est un livre qui, dès l’origine, échappait aux classifications habituelles. Il s’agit d’un récit de voyage constamment interrompu par des voix.

Est-ce que le format théâtral vous semble-t-il particulièrement adapté à la transmission des thèmes et des émotions qu’on trouve dans “Parallèles” ?

C’est un texte que j’ai eu envie de dire à voix haute. Quand je l’ai présenté à Bilembo en février, puis à Paris en mai, j’ai lu des extraits. Comme je suis également comédienne, dramaturge et metteuse en scène, l’envie de le réécrire pour l’adapter au théâtre s’est imposée. Le théâtre repose sur l’adresse directe au public. Or, ce texte, qui aborde plusieurs niveaux (colonisation, histoire française et congolaise, mémoire intime de ma famille), nécessitait une mise en espace. Cela correspondait parfaitement à une mise en forme théâtrale.

Quels sont les messages ou émotions que vous espérez faire passer au public à travers cette adaptation théâtrale ?

Je ne cherche pas à transmettre de messages particuliers. Je pense que la création répond avant tout à une nécessité de faire entendre et voir des réalités souvent passées sous silence, ou invisibles. Ce n’est pas tant un message qu’un geste visant à rendre audibles des mémoires et des paroles non dites. Pendant le voyage, j’ai perçu l’espace comme un être vivant, chargé de mémoires. Par exemple, je parle de la rivière Kwilu, témoin de milliers d’années d’histoire. Les paysages sont porteurs de mémoires, et celles-ci sont souvent enfermées dans des récits historiques ou nationaux, qui se présentent comme des vérités, mais qui sont en réalité des constructions. Je pars du principe que tout récit est une fiction, une construction. Je tente ainsi de bousculer ces récits qui m’ont formée, de les ébranler comme moi-même l’ai été. Cette perte de repères ouvre la voie à une liberté nouvelle, et peut-être à une forme de vérité, dans un monde où bien des mémoires sont étouffées.

Était-ce important d’impliquer des artistes congolais dans cette adaptation, compte tenu des liens qui lient la France à la RDC à travers ce livre ?

Oui, il était essentiel pour moi de travailler avec des artistes congolais. Le voyage que j’évoque, je l’ai effectué avec un artiste congolais et deux motards qui nous ont guidés. Réécrire ce texte, c’était aussi revisiter ce voyage à une autre période de ma vie. En discutant avec Taluyobisa, l’idée est née de construire cette œuvre ensemble. Nous tentons de créer un dialogue entre l’écriture et la musique. Taluyobisa est plus qu’un frère congolais pour moi : c’est un grand artiste, porteur de traditions à travers le mandimba, mais aussi par la guitare et la flûte. Il est héritier de mémoires rythmiques, et c’est ce qui m’a fascinée, car lors du voyage, j’ai ressenti des rythmes dans les paysages et dans le trajet lui-même. Travailler seule n’aurait pas eu la même richesse ; le dialogue était indispensable pour éviter que cela devienne un monologue. Ensuite, j’ai aussi voulu impliquer Junior, que je connaissais déjà, car il a été le responsable technique de la dernière édition du festival Piano de Kinshasa, dont j’étais l’administratrice. Humainement, c’est quelqu’un de solide et très fiable. Samuel Mwami, je le connais à peine, mais j’avais déjà vu plusieurs de ses photos et entendu parler de son travail. Ce que j’apprécie chez lui, c’est sa grande sensibilité à l’invisible. Je souhaitais qu’il travaille sur certaines photos qui seront projetées pendant le spectacle, et qu’il fasse des propositions.

Comment le théâtre peut-il apporter une nouvelle dimension à l’histoire que vous racontez ?

Cette adaptation m’a amenée à beaucoup réécrire. À l’origine, le texte était un assemblage de différentes voix et strates de mémoire. J’ai dû recomposer pour clarifier le propos pour le public, sans pour autant perdre cette sensation de déstabilisation. Ce que nous présenterons à Ntongo Elamu le 5 octobre est une première étape de travail, il y en aura d’autres. Plus nous avançons, plus les idées se précisent, et plus elles nécessitent de moyens et de temps. L’adaptation théâtrale a exigé une recomposition, une refonte. Certains morceaux du texte ont dû être retravaillés pour être plus théâtraux, ce qui a parfois ébranlé l’édifice initial. Mais ce processus de réécriture a permis de clarifier certaines choses. Le texte pour le théâtre est plus court, plus dense. Beaucoup de détails présents dans le livre ont été condensés ou supprimés. Par exemple, je n’ai pas besoin de décrire mon état d’esprit, il suffit que je l’incarne sur scène.

Y a-t-il des défis spécifiques dans la transposition d’un texte aussi introspectif et poétique sur scène ?

Oui, réécrire pour la scène m’a rapprochée de mes parents. La mémoire intime et familiale a pris plus d’importance. C’est à la fois une mise à nu, car je révèle des aspects très personnels, dont certains que je n’avais jamais partagés avec mes parents. Heureusement, je travaille avec une équipe formidable qui m’aide à avancer dans ce projet. Lorsque l’on parle de son intimité profonde, des résonances se créent avec celle des autres. C’est là, je pense, l’essence de l’humanité. Nous portons tous en nous des solitudes, mais l’art permet de créer des connexions entre elles. C’est la mission de l’art : créer des ponts entre les solitudes humaines.

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