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Rodrigo Gukwikila : “certains parents n’ont pas encore compris le pouvoir de l’art”

Il tient une structure qui s’appelle “Bilanga mobile”. A travers cette initiative, le peintre congolais, Rodrigo Gukwikila veut casser le mythe selon lequel l’art se cantonne à certaines personnes. Lui, il va à la rencontre des gens qui n’ont pas accès à cette discipline, en exposant ses tableaux à ciel ouvert, sur une avenue ou à un endroit accessible à tous.

Par Grady Mugisho

L’artiste peintre Rodrigo Gukwikila est l’initiateur du concept “Bilanga Mobile”, qui consiste à rendre l’art accessible à tout le monde @Photo Droits tiers.

publié le 24 septembre 2024 à 05:07:00

Depuis cinq ans, sa structure se fait le terreau de jeunes talents, offrant aux étudiants l’occasion de faire leur stage professionnel. Cette année, les travaux des étudiants ont été exposés à l’école Hortensias, située à Kintambo, à Kinshasa. Cela fait déjà deux ans que Bilanga mobile travaille en collaboration avec cette école primaire. Un tableau d’un étudiant a dérangé certains parents d’élèves. Cette peinture, mettant en exergue Kagame, a suscité des inquiétudes. Ainsi, ils ont demandé son retrait auprès du directeur de l’école. Pour le peintre, “certains parents congolais n’ont pas encore compris le pouvoir de l’art”.

Les étudiants viennent passer leur stage professionnel dans votre structure, Bilanga Mobile. Comment voyez-vous l’évolution de la formation des étudiants au sein de cette structure, notamment en ce qui concerne l’intégration de la théorie dans la pratique artistique contemporaine ?

Les étudiants viennent chez moi depuis 2020. C’est la quatrième année. Ils sont accueillis par moi-même. Je suis le seul artiste dans la structure. Il y a bien des gens qui me secondent, mais ce sont plutôt des amis qui viennent occasionnellement pour échanger avec les stagiaires, leur dire quelques mots, peut-être une ou deux fois. On travaille d’abord sur la théorie. Ensuite, on passe à la pratique. Mais si on ne maîtrise pas la théorie, comment la mettre en pratique ? On commence donc par des notions théoriques : restructuration, comment écrire ses pensées, comment développer une exposition et comment rendre cela accessible à la communauté. Aujourd’hui, l’artiste contemporain a une responsabilité envers la communauté. L’objectif est de lui offrir une lecture des idées contenues dans les œuvres, de faciliter une harmonie entre le sensuel et le visuel, tout en répondant à la question : que voulons-nous pour notre avenir, pour notre pays, pour notre futur ? Chaque année, les étudiants exposent leurs résultats à l’école primaire Hortensias, située à Kintambo. Nous sommes partenaires depuis 2 ans.

Pourquoi seulement l’école primaire ?

Parce que c’est la base. Aujourd’hui, nous sommes à l’université ou nous avons fait l’université. Mais n’oublions pas que nous venons d’un endroit où on nous a appris à bien écrire et à bien parler. L’objectif est de créer les acheteurs d’œuvres d’art de demain, ceux qui prendront le temps de réfléchir sur l’art, de faire en sorte que les tableaux des artistes se vendent, de valoriser l’art.

L’une des œuvres de vos stagiaires exposées à l’école Hortensias a dérangé certains parents d’élèves, ce qui a poussé le directeur de l’école à la retirer.

Pouvez-vous nous expliquer pourquoi cette réaction ?

L’un des étudiants a réalisé un portrait du président rwandais, Kagame. C’est une œuvre qui met en lumière sa quête incessante des minerais du Congo. Sur le tableau, il porte un masque troué. Il veut se protéger des conséquences de ses actes au Congo : c’est-à-dire tuer des gens pour les ressources naturelles. Mais la mobilisation des Congolais pour dénoncer sa quête effrénée des richesses du Congo l’en empêche. Malheureusement, trois jours après l’exposition, des parents sont venus se plaindre. Ils ont dit que l’œuvre incitait les enfants à la haine et à la révolte. Cela nous a surpris. Tout le monde sait que ce président tue des Congolais, mais quand les artistes s’expriment sur le sujet, ça devient un problème. D’ailleurs, l’image n’a rien de négatif. Elle montre simplement que nous sommes puissants face à l’ennemi. Mais la réaction des parents prouve qu’ils n’ont pas encore compris le pouvoir de l’art. Il peut dénoncer, critiquer, proposer. C’est très triste.

D’où vous est venu le concept de “Bilanga Mobile” ?

C’est un peu comme un jardin. Ma mère était maraîchère et présidente des femmes maraîchères. Mon oncle, qui était militaire, lui a donné une grande partie de ses terres. C’est ainsi que l’activité a commencé dans la famille. C’est une tradition prolifique. Mon père, lui, était enseignant. Quant à moi, j’ai suivi la voie de l’enseignement comme lui, mais sous une forme artistique. Je veux enseigner en “semant” des idées : semer dans l’imaginaire, enseigner et récolter cette semence. “Bilanga Mobile” parce que, où que je sois, je peux toujours créer, avec un stylo, une craie, une idée. C’est ainsi que ce concept est né.

À Kinshasa, on a l’impression que l’art est réservé à certaines personnes. Avec votre concept, vous semblez le rendre plus accessible. Est-ce important ?

Oui, en tant qu’étudiant, j’ai beaucoup travaillé sur l’éducation artistique dans les écoles. J’ai collaboré avec plusieurs établissements comme le collège Bonsomi et groupe scolaire Aurore. J’ai remarqué qu’il manquait un lien entre les jeunes et l’art. Les artistes doivent vivre de leur métier dans leur propre communauté. Si nous voulons évoluer, nous ne devons pas attendre que des étrangers viennent nous sauver. Nous devons créer, inspirer et construire notre propre imaginaire. Nous avons perdu une part de notre identité, notre propre imaginaire. Mon objectif avec Bilanga Mobile est de reconnecter la communauté à cet imaginaire, de semer dans l’esprit des jeunes artistes et de les encourager à organiser des expositions dans leurs quartiers, à Kinshasa et ailleurs. L’art doit s’adapter à son environnement et dialoguer avec la réalité sociale. Il ne faut pas éduquer la société uniquement à travers des images ou des concepts hérités de la colonisation ou de certaines doctrines religieuses. Il faut réorienter les esprits vers la créativité et la positivité. Aujourd’hui, on voit des modèles comme la Chine, où l’agriculture et la science sont intégrées à la communauté, et où l’art joue un rôle central dans le développement. Les beaux-arts orientent la pensée, créent des chemins pour l’avenir. Nous ne restons pas confinés dans des institutions comme l’Institut français. Avec Bilanga mobile, nous sommes en plein air, au cœur de la communauté, en travaillant avec la grande population de Kinshasa. Nous organisons des expositions en plein air, accessibles à tous. Tout ce travail est fait pour la communauté, pour éveiller les esprits et développer leur imagination.

Pensez-vous qu’aujourd’hui il est difficile pour un artiste de vivre de son art à Kinshasa ?

Partout dans le monde, c’est difficile, que ce soit aux États-Unis ou ailleurs. Ce qui manque, c’est l’éducation et l’information. L’histoire coloniale, l’esclavage, tout cela a déformé notre rapport à la culture et à l’art. Il y a une négligence de l’art dans la société. Le dessin est un outil essentiel, que ce soit en géographie, en sciences… Mais aujourd’hui, il y a un décalage entre la science et la réalité artistique, et la communauté n’est pas proche de l’art.

Vous avez mentionné que votre démarche artistique est positive. Pourquoi adopter cette posture dans un contexte comme celui du Congo, où tant de choses ne fonctionnent pas ?

La flèche, c’est l’avenir, c’est la direction. Il faut orienter les débats vers des solutions positives. Mon travail vise à encourager la communauté à être proactive, à ne pas se poser en victime, mais à trouver des solutions. Nous attendons trop souvent des solutions venant de l’extérieur. Mais nous devons être nos propres moteurs. Mes gestionnaires sont mes frères, je suis soutenu par ma communauté.

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Le ministre français de l’Intérieur, Bruno Retailleau a annoncé mercredi 2 octobre avoir ordonné au préfet de Mayotte d’organiser des «vols groupés» pour reconduire les ressortissants de la République démocratique du Congo dans leur pays. «Dès ce mois d’octobre, le préfet de Mayotte, il en a l’instruction, organisera des vols groupés pour pouvoir reconduire les étrangers en situation irrégulière vers la République démocratique du Congo», a déclaré Bruno Retailleau à l’Assemblée nationale lors des questions au gouvernement, interrogé par la députée RN Anchya Bamana.


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L’événement est organisé par le ministère de l’Environnement et développement durable avec l’appui de la FAO et d’autres partenaires comme le Fonds de l’environnement mondial (FEM). Le clou de cette activité a été le lancement de la phase de préparation du projet intitulé : “conservation communautaire de la biodiversité et des moyens de substance dans le contexte du changement climatique en RDC”.

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