Dans sa correspondance n° 471/Onatra/DG/CDG/2024 du 17 septembre 2024, le DG de l’Onatra SA, Martin Lukusa Cibangu Panu fait comprendre à la Dircab du VPM/ ministre des Transports, Jean-Pierre Bemba Gombo, Nadine Mishika qu’il renonce “aux droits me conférés par ma qualité de membre de coordination du comité de suivi de Redevance logistique terrestre, RLT/Onatra SA”. Martin Lukusa poursuit, “vous trouverez en annexe à la présente, la preuve de reversement du montant de USD 10 000 couvrant ma dernière rétribution mensuelle et le jeton de présence dans le compte centralisateur ouvert auprès de la Sofibanque”.
Jean-Pierre Bemba, le vice-Premier ministre de l’Economie nationale, Martin Lukusa, DG de l’Onatra et le chef de l’IGF, Jules Alingete. @Photo Droits tiers.
Elle énerve plutôt toute bonne conscience cet acte de séduction posé par le DG de l’Onatra auprès de Bemba Gombo via sa Dircab qui est aussi présidente du comité de suivi RLT/ Onatra SA! Martin Lukusa intriguerait sans doute à gagner les bonnes grâces du chairman du MLC dans l’optique d’une future mise en place au sein des entreprises, établissements et services publics. Sinon a-t-il machiné d’effacer un grief pour s’épargner les griffes de l’IGF (?). Mais son acte de renoncement d’une gratification mensuelle d’une somme de 10 000 $US – prélevés sur une cagnotte qui devrait servir à réhabiliter le réseau ferroviaire urbain et l’axe Matadi-Kinshasa-, étale sur la place publique la désinvolture dans la gestion de la chose publique! On gagne 10 000 $US, et d’autres plus, par le simple fait de marquer sa présence dans une réunion ! Et voilà 11 ans que ça dure!
La redevance logistique et terrestre (RLT) a été mise en place par arrêté interministériel n°010/CAB/MIN/TC/2018, n°016/CAB/MIN/ECONAT/2018 et no 010/CAB/MIN/FINANCES/2018 du 12 mars 2018 complétant et modifiant l’arrêté interministériel no 004/CAB/MIN/ECO§COM/2012, n° 101/CAB/MIN/TVC/2012 et n°557/CAB/MIN/FINANCES/2012 du 12 septembre 2012 fixant les modalités de perception de la redevance logistique terrestre au profit de la SCTP SA (ex ONATRA). Et l’article 7 de cet arrêté interministériel précise que « les ressources générées par la redevance logistique terrestre sont exclusivement affectées au financement de la réhabilitation et/ou de nouveaux projets ferroviaires de la SCTP. Elles ne peuvent, en aucune manière, servir à la prise en charge d’autres activités, encore moins des besoins de fonctionnement de la SCTP Sarl ». Mais près de quatre ans plus tard, donc en 2016, la RTL prélevée notamment auprès de pétroliers mobilise plus de 50 millions $US. Mais la réhabilitation du réseau ferroviaire ne se limite que par des travaux de désherbage et des menaces de récupération de force de l’emprise de la voie ferrée de la gare centrale à l’aéroport international de N’djili, côté est, et à Kinsuka dans l’ouest de la capitale. Rien ne s’est réalisé. Quelques mois après, le banc syndical de l’Onatra devenu SCTP SA, rapporte que les fonds de la RLT ont été amputés de 8 millions $US, il ne reste plus que 42 millions $US. En réalité, l’arrêté interministériel, créant la redevance a, en effet, été modifié, en catimini, pour ouvrir le champ de décaissement des fonds au profit des autres intérêts plutôt égoïstes. Il est, certes, vrai que l’arrêté interministériel n° 112/CAB/MIN/TVC/2012 du 5 décembre 2012 et n° 614/CAB/FINANCES/2012 du 05 décembre 2012, indiquait la mise en place d’un comité de suivi de la perception et de l’affectation des recettes de la RLT.
La mission de ce comité interministériel est de faire le suivi permanent de la perception et de l’affectation des recettes issues de la RLT. L’article 3 en donne la composition : un représentant du cabinet du Premier ministre, un représentant du ministre du Budget, trois pour le ministre des Transports et voies de communication, trois représentants du ministre des Finances, un du Portefeuille, et enfin 2 représentants de l’Onatra SA.
Au total , 11 délégués. Et la coordination de ce comité de suivi est assurée par le ministre des Transports, en l’occurrence Jean-Pierre Bemba. Nulle part, l’arrêté sur la RLT ne fait mention de paiement des jetons de présence pour les membres du comité de suivi. Mais depuis 2016, tous sont payés mensuellement par les fonds de la RLT, l’on croirait que la redevance constituait de fait un établissement public comme le Foner, le FPI, etc., Il est renseigné qu’entre 2013 et 2019, la redevance a collecté 100 millions $US. Et selon nos sources, entre 2019 et 2023, correspondant au premier quinquennat de Félix Tshisekedi, la RTL aura rapporté au bas mot 200 millions $US.
Avec cette somme, l’Onatra n’a nullement besoin de ce partenariat MCTC visiblement déséquilibré lui imposé par le gouvernement ! L’Onatra SA peut donc moderniser ses ports fluviaux et maritimes avec des engins performants à Matadi et Boma et requinquer son chemin de fer qui permettrait de transporter des conteneurs des grandes entreprises. Hélas, les recettes de RLT logées dans des banques sujettes à caution servent à la jouissance de nouveaux dignitaires, donc du copier-coller du système (A) MP-FCC.
Si le DG de l’Onatra SA, Martin Lukusa, touche 10.000 $US mensuel comme jeton de présence, à plus forte raison, combien toucherait le délégué de la Première ministre, Judith Suminwa Tuluka? Quid de 3 missi dominici du VPM en charge des Transports, Jean-Pierre Bemba qui, de plus, est coordon du comité, et les envoyés de différents ministres! En son temps, ministre des Transports sous Matata, Justin Kalumba Mwana Ngongo – aujourd’hui transhumé du bon côté de l’histoire – , touchait 5.000 $US et son Dircab 3.000 $US le mois, selon un rapport de la Ligue congolaise contre la corruption (Licoco) sur la RLT entre 2013 et 2019. L’alors DG de l’Onatra était à 3.500$US alors que les autres délégués de différents ministres touchaient 2.500 $US juste pour leurs présences. Pis, alors que l’arrêté reconnait 11 membres du comité de suivi, le paiement est fait pour 22 membres dont des ministres et leurs cabinets, dénonce la Licoco. “L’on est tenté d’appeler les assujettis à la RLT de ne plus rien payer, commente cet agent de la DGRAD sous couvert d’anonymat, car, poursuit-il, la redevance n’est aucun intérêt ni pour l’Onatra SA ni pour la population congolaise”. Et de s’interroger, ” où est donc passée la patrouille financière de l’IGF ?”