L’indignation est à son comble après le massacre qui a ensanglanté la prison centrale de Makala, faisant au moins 129 morts selon le dernier bilan officiel. Indignés, deux leaders de l’opposition, Moïse Katumbi et Denis Mukwege, ont dénoncé une tragédie qui aurait pu être évitée. Ils ont pointé du doigt l’indifférence et l’inaction criante des autorités congolaises.
Moïse Katumbi (à gauche) et Denis Mukwege (à droite) exigent des comptes après l’horreur de la prison Makala à Kinshasa, capitale de la RDC @Photo Droit tiers.
Sur X, le chef de file d’Ensemble pour la République a fustigé l’aveuglement des dirigeants qui ont ignoré les multiples alertes sur les conditions déplorables de la prison de Makala. Moïse Katumbi a même rappelé que depuis la libération du journaliste Stanys Bujakera, celui-ci a inlassablement dénoncé la surpopulation, la faim, la maladie et le manque d’hygiène dans cette prison, avec des preuves à l’appui. Pourtant, poursuit l’ancien candidat à la dernière présidentielle congolaise, les avertissements du professionnel de médias ont été ignorés, menant à un carnage qu’il qualifie « d’insupportable ».
Par ailleurs, Katumbi a critiqué sévèrement la réponse des autorités, notamment celle du vice-ministre de la Justice (Sumbu) qui avait initialement annoncé seulement deux morts, alors que le bilan officiel fait état de 129 victimes, dont 24 abattues par balles, ainsi que de nombreux cas de viols et de blessés. A haute voix, Katumbi exige la démission des responsables impliqués.
Par la même occasion, l’opposant appelle à la mise en place d’une commission d’enquête indépendante, incluant la MONUSCO et des ONG de droits de l’homme, pour faire la lumière sur ce massacre. Pour lui, ce drame aurait pu être évité si les dirigeants avaient pris en compte les mises en garde.
De son côté, le docteur Denis Mukwege a dénoncé dans un communiqué, la tuerie et appelé à une introspection sur les causes profondes de ces violences. Le Nobel s’indigne de la banalisation de la vie, le mépris pour la dignité humaine et l’impunité qui règnent en RDC. Le toubib considère ces éléments comme les racines des massacres répétés dans le pays.
Voilà pourquoi il a décrié le manque de changement dans le respect des droits humains malgré les promesses d’un « État de droit » par le régime Tshisekedi. Cependant, le gynécologue a exhorté la population à ne plus accepter l’inacceptable et à s’unir pour faire entendre sa voix. « Trop, c’est trop ». Et d’insister : « La vie humaine doit être respectée ».
Les prises de position de Katumbi et Mukwege démontrent une urgence : celle d’un changement profond dans la gestion des prisons et surtout le respect des droits humains en RDC. « Ce massacre à Makala est un signal d’alarme, une tragédie de trop qui doit pousser à des réformes immédiates pour éviter que de tels drames ne se répètent », explique à Ouragan, un défenseur des droits de l’homme.
– Des heures d’horreur –
Le plus grand établissement carcéral de la République démocratique du Congo a vécu une nuit d’horreur entre dimanche et lundi. Il est notoirement surpeuplé, hébergeant dix fois plus de détenus (entre 14 000 et 15 000) que sa capacité (1500 places), selon les statistiques officielles. Vers 2h du matin lundi, des coups de feu ont retenti, selon plusieurs riverains. Les tirs ont continué à résonner pendant de longues heures dans cette partie populaire et résidentielle de la capitale congolaise, ont-ils témoigné.
Dans l’obscurité, la scène s’apparentait à une tentative d’évasion. Mais personne n’osait l’attester. Ce n’est que plus tard, lorsque les premières vidéos de l’enceinte de l’établissement pénitentiaire circulaient, que la thèse a été confirmée. En réalité, il s’agissait d’un forcing des grilles mené par un groupe de prisonniers pour s’échapper. Malheureusement, pendant que les téméraires fonçaient, d’autres évadés ont tombé sous le feu nourri de la garde commise à la sécurité de la prison.
En effet, le bilan macabre est lourd. L’exécutif national a précisé qu’il y a eu 129 morts dont 24 par balles et une soixantaine de blessés. Les autres personnes sont décédées suite à une bousculade ou à un étouffement. Parmi les survivants, 59 personnes ont été blessées et sont actuellement soignées aux frais du gouvernement. De plus, des cas de viols ont été signalés parmi les femmes détenues au pavillon 9. Les bâtiments administratifs, le greffe, l’infirmerie et les dépôts de vivres ont été ravagés par des incendies.