Voilà une année que les cobalt et cuivre congolais étaient sous la menace de boycottage sans que Kinshasa n’ait pensé à rassurer son partenaire américain. A la Chambre des représentants, le républicain Chris Smith, ébloui par la taille des investissements chinois pour le contrôle des minerais stratégiques congolais, a, en effet, introduit fin juin, une proposition de loi visant à interdire l’importation de cobalt et de lithium congolais sous prétexte qu’ils sont les fruits de durs labeurs des mineurs dont les filles ainsi que des carrières muées en goulag par des patrons chinois.
Les agents d’une société minière dans le Lualaba @Photo Droits tiers.
Des ONG locales ont été mises à contribution, pour élaborer des rapports plus apocalyptiques et souvent avec des photos d’enfants creuseurs d’une époque lointaine. Et face à l’inaction du gouvernement, le département du Travail des États-Unis a, en effet, ajouté, mi-septembre, le minerai de cobalt (hétérogénite) de la RDC à sa liste de “Trafficking Victims Protection Reauthorization Act” (TV PRA) 2024 relative aux biens produits par le travail des enfants ou le travail forcé en tant que bien présentant un risque élevé d’être produit par le travail forcé. Les versions précédentes du rapport publiées tous les deux ans, incluaient le travail des enfants en RDC en raison de son occurrence historique dans les mines artisanales, tandis que la mise à jour de cette année établit un lien entre le travail forcé et l’exploitation minière artisanale et industrielle.
Le parti communiste chinois exploite les vastes ressources en cobalt de la RDC pour alimenter son économie, sur le dos d’ouvriers exploités et en faisant travailler des enfants!, s’est écrié le parlementaire Chris Smith.
Pendant ce temps, au Congo, il n’y a que le chef de service de l’IGF, Jules Alingete Key, pour conscientiser les décideurs, le gouvernement en tête, sur des pratiques illégales des investisseurs chinois. Hélas. La liste TVPRA met, en effet, en évidence certains produits à base de cobalt congolais qui, selon elle, sont « à risque » de travail forcé et de travail des enfants liés au cobalt : les batteries lithium-ion, les téléphones portables, les véhicules électriques, les implants médicaux et les prothèses, les pales de turbine, les aspirateurs et les moteurs d’avion.
L’inclusion du cobalt de la RDC sur la liste des produits soumis au travail forcé a été motivée par une étude financée par l’ILAB en 2023, qui a révélé que les travailleurs des mines industrielles et artisanales étaient soumis au travail forcé. Cette étude a mis en évidence les indicateurs du travail forcé, notamment les heures supplémentaires excessives, les travaux dangereux, les licenciements, les salaires impayés, les amendes, la servitude pour dettes et d’autres conséquences négatives sur les droits de l’homme. Le rapport fait aussi référence au fait que l’industrie du cobalt en RDC est dominée par de grandes mines appartenant à des Chinois.
Le rapport de TVPRA précise que le cobalt congolais est repris sur la liste noire de 29 nouveaux produits qui rejoignent notamment le minerai de cuivre de la RDC et de la Zambie, un autre pays dont la région de copperbelt est pratiquement passée sous contrôle “financier” chinois. À défaut de persuader leur opinion publique à boycotter les made in China dont voitures électriques, mobiles, électro-menagers, convaincus de l’impact limité au succès des importations chinoises, les gouvernements des États-Unis, du Canada et de l’Europe agitent la fibre de moralité, de complicité et collaboration à l’infanticide comme arme de dissuasion massive. L’objectif de la liste TVPRA est, en effet, de sensibiliser le public au risque plus élevé que la normale qu’un bien provenant d’un pays donné ait été produit par le travail forcé ou le travail des enfants. Elle est destinée à être utilisée comme ressource par la société civile qui cherche à mettre en évidence les violations des droits du travail dans les chaînes de valeur mondiales, et par les entreprises qui s’efforcent de prévenir et d’atténuer ces violations.
Travailleurs congolais totalement nus – Depuis 2018, le mandat de la TVPRA a été élargi pour inclure les « intrants », ce qui signifie que les produits utilisant du cobalt, tels que les véhicules électriques et les appareils portables, sont également considérés comme « à risque » de travail forcé et de travail des enfants. Il est toutefois vrai que les conditions de travail dans les chaudronneries chinoises qui champignonnent au Haut-Katanga, en Ituri en passant par le Lualaba, le Tanganyika, le Nord et Sud-Kivu laissent à désirer. Radio Okapi a, déjà, fait état des travailleurs congolais contraints de travailler face à des vagues de chaleur qui s’échappent de fours artisanaux de transformation de cuivre et du cobalt.
Toutefois, TVPRA indique que l’exclusion du cobalt congolais ne signifie pas nécessairement que ces marchandises seront “automatiquement arrêtées aux frontières des États-Unis”. Et de nuancer ensuite, “néanmoins”, ça augmente la probabilité qu’ils fassent l’objet d’un examen plus approfondi de la part des autorités “américaines en raison des interdictions d’importation”. Toutefois, il est possible qu’un bien soit retiré de la liste TVPRA lorsqu’il n’existe plus suffisamment des preuves permettant de croire que le travail des enfants, le travail forcé ou le travail forcé des enfants est impliqué dans sa production, sauf dans des cas isolés. Évoquant le ralentissement des importations chinoises, dès l’année prochaine, les rédacteurs du budget de la RDC pour l’exercice 2025 prévoient, en effet, une chute des exportations du cuivre, du cobalt…et même du pétrole.
Le ministre des Hydrocarbures, Guy-Aimé Sakombi Molendo, s’y emploie pour une remontada. Voilà au moins une bonne nouvelle, au milieu des chinoiseries dans lesquelles le gouvernement s’est emberlificoté en faisant la part belle aux intérêts égoïstes, à l’image de cette ONG à Manono, au Tanganyika, qui a reçu aussi aisément 70 millions de dollars des Chinois de Zijin, soit plus de cinq fois les recettes annuelles de la province !