Ils s’étaient quittés le 30 mai, le jour où Salomon Kalonda Idi Della avait été arrêté à l’aéroport de N’djili, au lendemain d’une marche de l’opposition réprimée dans le sang à Kinshasa. Kalonda brutalisé, image ayant tourné en boucle sur les réseaux sociaux, avait été jeté par la suite en prison, l’arrachant à l’affection de sa famille. La douleur était forte. Abattu, Katumbi avait fulminé de colère de voir un de ses pions majeurs être mis au gnouf alors que l’arbitre électoral s’apprêtait à donner le coup d’envoi.

Sa consternation, son indignation et sa colère se lisaient sur son visage ce jour-là. Le pire est qu’à la suite de son arrestation, celui qu’il considère comme son fils, va tomber malade prêt même à laisser sa peau. “Il a risqué gros. Il a fallu une longue bataille juridique pour qu’il soit évacué”, raconte un autre cadre Ensemble. Le moment était pénible pour Moïse de voir Salomon payer le prix de son combat pour la démocratie.

– La douleur passée, c’est la joie –

Après cette période de tristesse, vient enfin la joie. La nuit tombée à la résidence du Chairman, Katumbi et Kalonda peuvent encore se revoir. De chaudes retrouvailles qui rappellent la longue marche parcourue ensemble. Difficile d’imaginer leur ressenti. Sinon, le moment était magique. Katumbi et Kalonda ont d’abord parlé à deux, avant de recevoir leurs convives pour un festin. Autour de la table : députés nationaux, députés provinciaux, cadres du parti, le tout dans une ambiance de fête. Fêter le retour d’un enfant dans sa famille. “Il avait été arraché de sa famille mais aujourd’hui, il rentre au bercail”, glisse un Katumbi, tout aussi heureux de revoir son “spécial”. Les retrouvailles ont été immortalisées par une photo de famille, symbole de la paix du cœur retrouvée.

– Salomon, le disciple de Katumbi –

Salomon, c’est un autre Katumbi. Le disciple copie tout de son Maître : l’esprit entrepreneurial, la bravoure, la générosité, le souci de développement des entités de base, bref le combat pour sortir la population de la pauvreté. A l’exemple de Kashobwe, Kalonda est en train de transformer Kibombo. “Le spécial est en voie de dupliquer Kashobwe au Maniema”, raconte un acteur de la société civile du Maniema convaincu que SK Della a emboîté le pas à son maître. Malheureusement, l’élan imprimé pour le développement de son terroir a été stoppé suite à son arrestation. Pourtant, Kalonda Idi Della avait fait réhabiliter sur fonds propres la route Kindu-Kibombo, désenclavant ainsi de nombreux villages qui inondent la capitale provinciale du Maniema en produits de première nécessité. Outre la route et le soutien aux agriculteurs locaux, écoles et hôpitaux ont été réhabilités et construits. Pas surprenant qu’il soit élu même en prison. Le nom SK Della l’a précédé partout. Il était dans l’esprit de la population dans tous les bureaux de vote comme l’a été Katumbi lors de la présidentielle de décembre 2023.

– Katumbi et Kalonda redonnent le sourire à Bibi Aziza Ali –

En juin 2023 quand Salomon Kalonda croupissait encore au quartier général du renseignement militaire à Kinshasa, “la résidence de sa mère Bibi Aziza Ali, 86 ans, était perquisitionnée par des militaires lourdement armés. La maison avait été vandalisée, ses nattes de prière musulmane profanées”. Ce jour-là, l’octogénaire était abattue, blessée dans son amour de mère et ressentant une certaine humiliation. 11 mois après, même si elle garde encore en mémoire cet épisode cauchemardesque, Aziza est ravie de revoir son fils, debout sur ses deux pieds, pourtant évacué quelques mois avant à Bruxelles par un avion médicalisé. Le moment de rendre grâce à Dieu. A l’arrivée de Salomon Kalonda chez sa tendre mère, Aziza a retrouvé le sourire surtout que Katumbi était là, lui qui l’avait consolé avec son épouse, au lendemain de cette perquisition barbare. Les musulmans ont prié, glorifié le seigneur pour le retour de leur frère à la maison. Lors de son adresse, Katumbi a salué le soutien communauté musulmane apporté à SK Della pendant le moment de douleur. Prenant la parole, le sénateur du Haut-Katanga, ému, a rappelé toutes les étapes difficiles vécues, expliquant qu’il doit sa guérison à Dieu. Malade en prison, seul Allah lui donnait la force. Kalonda a remercié les frères musulmans pour leurs prières, insistant dans son discours sur la paix, l’unité et la cohésion qui doivent régner au pays.

Deux garçons de la fratrie Idi Della – qui compte neuf enfants en vie, ont choisi d’évoluer en politique, un domaine souvent impitoyable. Moïse Moni Della, le deuxième, a fourbi ses armes à l’UDPS, suivant tous les mouvements des pères fondateurs. Un activisme qui lui a coûté des années de brimades et d’exil. Contraint de fuir la dictature de Mobutu, il a dû traverser le fleuve pour gagner Brazzaville, débutant ainsi une longue expatriation en Europe. A son retour à Kinshasa, il est passé par le RCD/N de son vieux compagnon Roger Lumbala, le même, avant d’entrer dans le gouvernement 1+4 en qualité de vice-ministre à l’Information en 2006, après un passage dans «Soutien à Etienne Tshisekedi» –SET. Il a été de tous les combats de l’opposition jusqu’à la création du Rassemblement.

Salomon Kalonda, le cinquième de la famille, est le bras droit de l’opposant Moïse Katumbi, allié puis aujourd’hui adversaire politique du président de la République Félix Tshisekedi. Comme son mentor, Kalonda a fait trois ans d’exil à Bruxelles peu après leur départ du PPRD en 2015. Mais quand Katumbi obtient son passeport et rentre au pays en mai 2019 avec dans sa suite Olivier Kamitatu et Francis Kalombo, lui n’est pas du voyage. Il n’a pas immédiatement droit à son passeport. Après plusieurs mois de négociations avec les nouvelles autorités du pays, il l’acquiert finalement début octobre 2019, en marge d’une visite de Félix Tshisekedi à Bruxelles.