Depuis les années glorieuses du MPR jusqu’à aujourd’hui, Modeste Bahati n’a jamais renoncé à son rêve de jouer les premiers rôles. Le chef de l’Alliance des forces démocratiques du Congo et Alliés (AFDC-A), étale partout sa gourmandise. Sa soif de pouvoir l’avait éloigné de Joseph Kabila. Aujourd’hui, c’est autour de Félix Tshisekedi de subir les foudres d’un Bahati déçu, frustré de ne pas avoir obtenu ce qu’il considère comme son dû. Il fait chanter le président, pensant que son discours docile n’est pas décodé en haut lieu.
Modeste Bahati, chef de file de l’AFDC-A, membre de l’Union sacrée (majorité au pouvoir) @Photo Droits tiers.
Modeste Bahati est le politicien qui, à travers les décennies, rôde toujours autour du pouvoir. Il a su imposer un leadership de survie politique. Entre une ambition vorace et une soif inextinguible de pouvoir, Bahati incarne une quête perpétuelle de reconnaissance et une insatiable appétence pour les hautes sphères.
Le deuxième vice-président du Sénat a toujours cherché à s’ériger en leader incontesté. Son parcours est marqué par une constante : il veut tout pour lui, rien pour les autres. Lors de son point de presse lundi 2 septembre à Kinshasa, l’élu du Sud-Kivu s’est posé en victime d’une grande injustice. Se remettant « hypocritement » au sens élevé de paix et de justice du chef de l’État, le « vieux Maradona » a exprimé sa déception face à la composition du gouvernement Suminwa, où, selon lui, sa boîte n’a pas été récompensée à la hauteur de son poids politique. « Ce qui est arrivé à l’AFDC-A à la sortie du gouvernement Suminwa est biblique. Ceux qui ont réclamé la fin de l’AFDC finiront par périr eux-mêmes », a-t-il tonné, ajoutant une dimension quasi mystique (spirituelle) à son discours.
Modeste Bahati n’a pas avalé sa déception. Il réclame ouvertement ce qu’il pense lui revenir de droit : la considération de son poids politique. Pour lui, l’AFDC-A mérite plus, pas de miettes. Dans une posture à la fois combative et maligne, il a exhorté ses militants à faire confiance au président Tshisekedi, tout en laissant planer le doute sur la présidentielle prochaine : « 2028, est-ce que Bahati Lukwebo sera candidat à la présidence de la République ? Je suis croyant, à cette question, je laisse la réponse à Dieu car seul Lui sait comment sera demain », a-t-il fait savoir. L’homme risque de tourner le dos au régime Udps comme il l’a fait avec Kabila.
En clair, le vieux routier est un éternel insatisfait, toujours à la recherche effrénée du pouvoir, tacle un cadre de son regroupement politique entré en dissidence. Ses relations politiques semblent s’articuler autour de cette dynamique : « tant qu’il est servi, il soutient ; dès qu’il se sent lésé, il critique et se rebelle, a-t-il ajouté. Après avoir défié Joseph Kabila, voilà qu’il se trouve désormais en position délicate avec Félix Tshisekedi, malgré les apparences de soutien affichées », fait remarquer un analyste politique.
Cette insatisfaction chronique, cette ambition sans limite, soulèvent des questions sur la place de Bahati Lukwebo dans l’Union sacrée. Sera-t-il capable de jouer le jeu des alliances sans se perdre dans ses propres exigences ? Ou continuera-t-il à se heurter à ses partenaires de route, toujours plaintif, toujours voulant tout gagner ? Un cardinal de la famille politique du chef de l’Etat estime que l’histoire politique de la RDC semble encore pleine de promesses et de désillusions pour cet homme qui ne se contente jamais de la place qui lui est accordée.