Erreur d’appréciation ou de jugement ? Le peuple congolais est désagréablement surpris par la stagnation de tous les secteurs de la vie nationale. Rien ne marche. La cheffe du gouvernement est inactive et aphone. Le choix des animateurs est-il l’une des causes du fiasco ?. On n’obtient pas de bons résultats avec les acteurs de l’échec en appliquant les mêmes méthodes.
La cheffe du gouvernement, Judith Suminwa Tuluka @Photo Droits tiers.
Au mois d’avril dernier, le président Tshisekedi a nommé Judith Suminwa Tuluka, Première ministre, cheffe du gouvernement. Elle a remplacé Jean-Michel Samama Lukonde Kyenge. Fatshi, champion de la masculinité positive, a porté son choix sur une femme. Une première dans l’histoire de la RDC, selon certaines langues. Le gender est-il vraiment un atout ? Ancienne ministre du Plan, Suminwa est présentée comme experte du PNUD, douée, auréolée des diplômes des universités occidentales et membre de l’UDPS. Mais quatre mois après sa nomination, rien n’a changé. Comme son prédécesseur Sama, la cheffe du gouvernement est inaudible et invisible. Aucune action d’éclat. Son gouvernement ressemble à un copier-coller de Sama. Le “recyclage” de plusieurs ministres en dépit de quelques nouveaux visages est une copie certifiée conforme.
Les faits et gestes du gouvernement Suminwa sont illisibles et imprévisibles comme à l’époque de Sama. Les Congolais constatent que les deux gouvernements sont caractérisés par l’indolence, l’inertie et l’inefficacité. Après la comparaison de deux Premiers ministres, la conclusion est la suivante avec cette formule : « Gouvernement Suminwa égale Sama 3 ». Une sorte de continuité des gouvernements Sama 1 et 2.
– Que de réunions –
A quoi servent les réunions du gouvernement ? De quoi parle-t-on ? L’opposant Epenge ironisait, il y a peu, que nous avons « un gouvernement des couturiers et des ingénieurs en construction qui ne prend que des mesures pour un rendement nul ». Les réunions de l’exécutif sont similaires aux attroupements inutiles. Aucun impact positif pour le pays. Tenez : le Conseil des ministres était tenu une fois de 10 à 20 h avec comme principale préoccupation « la divagation des chiens dans nos villes ». Le vendredi 6 septembre, le gouvernement s’est réuni après une tentative d’évasion tragique à la prison centrale de Makala. Principale résolution, la cheffe du gouvernement a rappelé son équipe à « une communication coordonnée et ordonnée ». Car, après le drame de Makala, le vice-ministre de la Justice, Samuel Mbemba a parlé de deux morts et de plusieurs blessés. Quelques heures après, le vice-Premier de l’Intérieur, Jacquemin Shabani donnait un bilan lourd de 129 morts. Une vraie cacophonie au sommet de l’Etat. Le 9 septembre, le président de la République dirigeait à son tour, un Conseil des ministres extraordinaire sur le même sujet. Le magistrat suprême exigeait un rapport complet sur les événements de Makala dans 7 jours.
– Des projets sans chronogramme ni résultats –
Le projet 100 jours a été un naufrage tandis que « Tshilejelu, Kin Elenda, Kinshasa Zéro Trou, Kin Bopeto, Centrale solaire de Maluku » des poissons d’avril. On ignore à ce jour la suite réservée aux ouvrages du Grand Kasaï, au Port en eau profonde de Banana, au Centre financier de Kinshasa, à l’Arena et surtout à l’ambitieux PDL 145 territoires. Tous ces projets visaient entre autres, la construction des routes, des ponts et des bâtiments.
Sur le plan sécuritaire, plusieurs territoires dans l’est du pays sont encore sous occupation étrangère. On observe des poches d’insécurité ailleurs jusqu’à la périphérie de Kinshasa avec la milice Mobondo. Dans les grandes villes, les autorités peinent à endiguer la délinquance juvénile « Kuluna ». Le syndrome haïtien.
Sur le plan économique, seuls les discours lénifiants se multiplient. Tous les indicateurs sont au rouge, note un cadre d’une banque de la place. Le vice-Premier ministre de l’Economie, Daniel Mukoko vient de lever une option suicidaire : défiscaliser et exonérer certains produits alimentaires pour favoriser les importations. Une hérésie économique, dégainent les experts du secteur. Une anesthésie à la production locale. Vive le dumping ! Une autre personne, on comprendrait, mais excellent enseignant d’économie comme Mukoko, non. Incompréhensible. Il aurait laissé son savoir dans les amphithéâtres, insinue un de ses anciens étudiants. Il est en contradiction flagrante avec son collègue du Commerce extérieur, Julien Paluku. La stabilité monétaire est toujours un gros souci pour les Congolais. Il n’y a ni pain ni paix.
Sur le plan social, en dépit de la gratuité de l’enseignement primaire et de la maternité, aucune évolution notable. La rue gronde. Des grèves, des mécontentements et des frustrations partout. La circulation routière dans les villes, un casse-tête. A Kinshasa, par exemple, le ministre de l’Intérieur se bat pour rappeler à l’ordre les conducteurs à travers une campagne de sensibilisation des automobilistes au respect du code de la route. Mais où sont les routes ? On poursuit l’ombre sans s’attaquer au sujet. Le ministre des Travaux publics et le gouverneur de Kinshasa n’ont apporté aucune solution jusque-là.
Le ministre des ITPR, Alexis Gisaro est un champion des coupures de rubans symboliques et de lancements des ouvrages inachevés. Il est allé lancer les travaux de la route Kalamba-Mbuji à Kananga, alors que Félix Tshisekedi l’avait fait en sa présence en 2022. Depuis le dernier passage de Gisaro au Kasaï central, rien n’a été fait. Une simple escapade comme ses nombreux collègues, régulièrement en missions de tourisme au pays et à l’étranger. La taille de la délégation de la RDC lors du dernier sommet Chine-Afrique a choqué plus d’un. Le gouvernement devrait prêcher l’austérité.
– Où est passé Judith Suminwa Tuluka ? –
Elle disait « ne me faites pas tarder » lors des consultations pour former son équipe. Les visites de compassion et les déclarations ne suffisent plus. La Première ministre parle déjà de l’évaluation des ministres dans un bref délai. Un aveu d’échec. Si les ministres de la Justice Constant Mutamba, des Finances Doudou Fwamba, de la Communication et médias, Patrick Muyaya, des Hydrocarbures, Aimé Molendo Sakombi, de l’Intérieur Jacquemin Shabani et de l’Industrie Louis Watum, du Commerce extérieur, Julien Paluku tentent relativement de se démarquer, l’ensemble de l’exécutif reste nonchalant voire inexistant. Le gouvernement Suminwa vaut celui de Sama 3. Il ne dispose pas d’un tableau de bord pour les actions à mener. Si évaluation, il y avait, elle devrait être une table rase pour restaurer la confiance car, il y a rupture entre les gouvernants et les gouvernés. Il n’y a pas d’amour aveugle entre les dirigeants et le peuple. C’est le rendez-vous du donner et du recevoir pour reprendre l’expression de Léopold Sédar Senghor. En somme, les électeurs votent un projet de société en amont et exigent des comptes en aval. Au gouvernement de réaliser les promesses électorales. Les six engagements de Félix Tshisekedi sont ainsi à l’épreuve. Plus d’excuses.