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Bon marché, les “Malewa” (gargotes), lieux à haut risque sanitaire à Kinshasa

Dans la capitale congolaise, les gargotes de rue bon marché, appelées “malewa”, sont de plus en plus prisées malgré une hygiène douteuse. Si elles ont le mérite de fournir des repas consistants et à moindre frais, elles exposent les consommateurs aux maladies dites “des mains sales”. Les restauratrices se distinguent souvent par une malpropreté criante. Pourtant, l’aventure s’avère prometteuse pour les tenancières vu les ressources consistantes qu’elles rapportent.

Par Patrick Mputu

Un « Malewa »(gargote), installé au terrain de l’hôpital général de référence de Kinshasa (ex-Mama Yemo) @Photo Ouragan.

publié le 26 juillet 2024 à 05:01:00

« Ici, pour 2 000 francs, je mange à ma faim », témoigne un client trentenaire penché sur son assiette de riz et de haricots. Mercredi 24 juillet, nous sommes au terrain de foot « Mama Yemo » (ancien nom de l’hôpital général de Kinshasa) en plein centre-ville dans la commune de Gombe. Déjà à 9h, alors qu’une équipe de jeunes s’entraîne, les extrémités du terrain sont prises d’assaut. Deux restaurants de fortune attirent du monde. Une table pour placer les repas couverte d’un parasol, un banc et une autre couverte par une bâche accueillent les clients.

“J’ai commencé à faire ça pour payer l’école de mes enfants”, explique Lisette, mère de huit enfants. Elle n’a aucune idée du nombre d’assiettes qu’elle sert par jour : « Une centaine peut-être…Les premiers clients arrivent à 7h et nous font pression », précise-t-elle. Près de 100 mètres d’elle, Mima (sobriquet de Mamie), avait ouvert le sien, quelques mois avant. “Les bénéfices m’aident beaucoup mais surtout mes enfants. Je leur achète des chaussures, pantalons…”, confie-t-elle.

À côté, le reporter d’Ouragan a constaté d’autres activités commerciales. Le tonneau de dindons, la vente de gerbes de fleurs, les cabines téléphoniques et le cirage des chaussures se mêlent à cette scène animée.

– Étudiants et enseignants, des clients fidèles –

Cherchant à attirer une large clientèle, les propriétaires de ces restos, majoritairement des femmes, se sont installés soit dans les cours des universités et instituts supérieurs, soit aux alentours. À l’Université des sciences de l’information et de la communication (UNISIC, ex-IFASIC), ces cantines bon marché se trouvent juste en face des bâtiments universitaires, dans l’enceinte de l’espace appelé « Kingakati », un grand lieu où se tiennent des kermesses pendant les vacances mais l’espace est un repère réputé des amoureux.

Il se remplit d’étudiants, d’enseignants, d’agents administratifs et de visiteurs. Dès les premières heures, les patronnes de ces boui-bouis attirent, presque chaque jour, des centaines de clients désireux de consommer aliments et boissons à moindre frais. À l’œuvre à 6h30, les ménagères installent rapidement leurs brasiers et ustensiles à ciel ouvert. Les grosses marmites bouillonnent à longueur de journée pour répondre à la demande sans cesse croissante d’une clientèle de plus en plus nombreuse.

Conscient des conditions hygiéniques déplorables, Honoré, étudiant en Master 2 (ancien stagiaire à Ouragan), avoue que face à la demande du ventre, il ne tient pas compte de l’environnement impropre, car dans le voisinage, il y a des restaurants plus viables mais les prix sont élevés. « Les plats sont bons et pas chers, c’est vraiment pratique pour nous les étudiants qui n’avons pas assez de moyens », a-t-il confessé.

Contraints de quitter très tôt leurs domiciles pour venir assister aux cours, les étudiants et même les enseignants ont pris l’habitude de se ravitailler dans ces restos de fortune avant et après leurs occupations. Le matin, ils commandent le petit déjeuner, composé principalement de pain beurré, d’omelettes et de boissons sucrées. À partir de midi, ils se ruent de nouveau chez leurs fournisseurs pour des repas beaucoup plus consistants : fufu, chikwange, bananes plantains, riz, fumbwa, haricots, poissons fumés, cuisses de poulets, pâte de spaghetti et autres. « On sait que ce n’est pas toujours propre comme à la maison, mais on n’a pas de choix. On fait confiance aux mêmes personnes parce qu’on les connaît bien », raconte Fabiola, étudiante en L3.

La réalité est identique dans d’autres communes où ces « Malewa » sont installés à proximité de garages, comme à Kasa-Vubu sur l’avenue Saïo. Dans la commune de Lingwala par exemple, d’autres ne travaillent que la nuit à partir de 20h, rassurées par une clientèle majoritairement composée de célibataires fatigués revenant du boulot.

– Risque sanitaire imminent –

Le docteur Guy-Roger Kingenzi tire cependant la sonnette d’alarme concernant les dangers sanitaires des gargotes de rue à Kinshasa. « Leur installation en pleine rue, au milieu de la poussière et des gaz d’échappement, parfois à proximité de caniveaux d’eau croupie ou de tas d’ordures, multiplie les risques de maladies, notamment celles dites “des mains sales” comme les diarrhées, les vers intestinaux, la fièvre typhoïde et le choléra », explique-t-il.

Selon le toubib, les maladies liées aux aliments contaminés touchent directement les systèmes digestifs, provoquant des symptômes tels que la diarrhée, les nausées, les douleurs abdominales et la fièvre. « Ces affections peuvent s’aggraver et entraîner de nombreux décès, en particulier chez les enfants de moins de cinq ans », avertit-il.

Le problème de conservation des aliments dans ces établissements précaires exacerbe la situation, favorisant la propagation d’épidémies et l’émergence de nouvelles maladies. Toutefois, la blouse blanche souligne l’existence de programmes de prévention, notamment la vaccination, pour lutter contre ce type de maladies.

– Mettre de l’ordre dans le secteur –

Depuis 2021, Clarisse Mpanumpanu scrute l’hygiène alimentaire des restaurants de fortune à la loupe. La présidente de l’Asbl “Initiatives espoir et vie” (IEV) a fait état d’une situation peu reluisante, car peu d’établissements respectent réellement les normes.

Face à cette réalité empirique, la jeune dame estime qu’il est nécessaire, et même obligatoire, de faire maîtriser aux « Mamans Malewa » les règles d’hygiène pour une offre alimentaire de qualité. “Nous avons constaté une prolifération des restaurants de fortune communément appelés Malewa. Or, la restauration contribue à la santé et à l’équilibre d’un individu. C’est un secteur qui mérite d’être suivi et accompagné pour permettre à ces femmes de travailler dans de meilleures conditions. Que les Kinois soient nourris correctement et évitent les maladies alimentaires”, a-t-elle insisté.

Des règles et de bonnes pratiques existent et doivent être connues et appliquées. Dans cette logique, la vigie de l’hygiène pour les gargotes compte instaurer une formation, un label de restauration et une mutuelle. “À ces femmes, notre apport sera la formation, mais aussi un kit de matériels comprenant des marmites, des couverts et tout ce qu’il faut pour faire fonctionner le restaurant”, a-t-elle promis avant de s’interroger : « Pourquoi ne pas leur permettre de s’organiser en coopérative pour qu’elles puissent accéder aux crédits ».

L’hygiène alimentaire en restauration doit commencer par la sensibilisation et la mobilisation des principales actrices. La responsable de l’IEV entend faire du contrôle permanent des restaurations de rue l’une de ses priorités.

En dépit de leur succès, ces restaurants de fortune posent un sérieux problème au système sanitaire local. Leur proximité avec des sources de pollution expose les clients à de nombreuses maladies liées principalement à une mauvaise hygiène alimentaire et favorise parfois l’expansion des épidémies.

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