Selon le ministre sortant des Finances, Nicolas Kazadi, l’État aurait dû se désengager de la Société financière de développement (SOFIDE) suite à sa décision de créer une nouvelle institution spécialisée dans le financement à moyen et long terme. Laquelle banque devrait financer l’ambitieux projet de développement local de 145 territoires (PDL-145T). Rien n’est venu. Pour l’exercice 2024, Sofide va vivoter d’une intervention de l’État de 500 millions de FC, soit moins de 200 000 dollars.
Le bâtiment abritant le siège de SOFIDE à Kinshasa @Photo Droits tiers.
Et pourtant l’argentier national rassurait que le gouvernement, sur “les manifestations d’intérêt spontané des investisseurs privés”, désireux de reprendre Sofide et capables de la redynamiser en temps utile. “Le ministère des Finances travaille à ce propos sur les différentes options de reprise qui seront par la suite discutées avec le ministère du Portefeuille avant d’être présentées en Conseil des ministres”, a conclu Kazadi.
Selon des experts, c’est le BCECO qui aurait dû être dissout et liquidé depuis 2012, conséquence de la mise en place de l’Autorité de régulation de marchés publics (ARMP), la Direction générale de contrôle des marchés publics, DGCMP ou encore la remise en service de la SOFIDE. « Le BCECO est une pire escroquerie », s’était déjà écrié en son temps l’ex-ministre des Finances, Gilbert Kiakwama. Bernique.
Mais le Bureau central de coordination des projets s’est mu en un établissement public, à l’instar du COPIREP, sauvé de justesse en son temps d’une liquidation-dissolution. Pourtant la Banque mondiale est revenue à la charge dans une note datée du 2 août 2012, exigeant des institutions étatiques de ne plus servir d’agence de passation des marchés ni de maître d’ouvrage délégué (MOD) dans les projets sous financement IDA. Le BCECO est, en effet, mis à l’index sans être cité nommément. Voilà sans doute pourquoi le gouvernement a vite remis en service la Société de financement et de développement (SOFIDE) avec une dotation de USD 10 millions.
Courant 2014, la presse locale tombe sur une correspondance au style sec, vitriolé, de l’alors directeur de cabinet du chef de l’État, Gustave Beya Siku, adressée au Premier ministre. En résumé, tout passe par le BCECO. C’en est trop…un projet de fusionner le BCECO et la DGCMP (Direction générale congolaise des marchés publics) a même été proposé par le Dircab. Pour mémoire, Matata Ponyo était DG du BCECO quand il a été appelé au gouvernement comme ministre des Finances puis Premier ministre. Et la DGCMP, au départ, était sous la tutelle du Premier ministre avant de passer au Budget.
Mi-2012, Patrice Kitebi Kibol Mvul, alors ministre délégué près le Premier ministre en charge des Finances, recrute un cabinet de consulting français, MAZARS, en vue d’étudier des pistes de mutation du BCECO. En clair, comment éviter la dissolution-liquidation du BCECO. Kitebi justifie, en effet, sa démarche par le fait que le BCECO est la structure qui maîtrise mieux les procédures des bailleurs de fonds. Que le BCECO soit une école de référence pour la RDC. Qu’il soit une pépinière des experts nationaux expérimentés qui n’ont rien à envier aux experts internationaux. Qu’il dispose d’une maîtrise avérée de différents domaines, dont la passation des marchés et de gestion financière. Qu’il offre ses prestations à un coût moins coûteux que celui des agences privées ou celles des Nations unies. Que le futur établissement public n’aura pas à se substituer aux organes récemment créés pour gérer les marchés publics. Que le BCECO pourrait, par exemple, offrir son assistance technique à ces organes. Qu’il peut s’agir de l’identification, la préparation et l’évaluation des projets ou encore de la formation sur demande de l’ARMP, en passation des marchés, en suivi-évaluation des projets même en partenariat avec les firmes spécialisées en formation et professionnalisation de certains cadres. Qu’il peut aussi assurer la gestion des projets spécifiques au titre de maître d’ouvrage délégué.
Mais certains observateurs voient les choses autrement. Le BCECO, font-ils comprendre, est opérationnel depuis 2001. Ce sont des dizaines d’emplois directs et indirects qui sont en jeu, des marchés juteux…tout un système. Dans un de ses rapports, la FEC, principal patronat congolais, a fait état des allégations des commissions de 30% que ses affiliés auraient été contraints de virer dans un compte afin de gagner un marché géré par le BCECO. L’affaire avait fait une forte polémique. Pour sa survie, le cabinet MAZARS a, en effet, proposé au BCECO de se muer soit en une société par actions de droit public, soit en entreprise publique, soit en établissement public. La seconde assertion a été considérée au détriment de Sofide. Le changement de l’ordre politique n’y a rien changé.