Denis Kadima est dans le dur. À deux jours du début de la campagne électorale, 9 candidats présidents de la République somment le président de la Commission électorale nationale indépendante de convoquer une nouvelle réunion pour trouver un accord sur le respect des règles du jeu et des principes d’organisation d’élections crédibles, démocratiques, transparentes et impartiales. Voilà pourquoi, les signataires ont appelé jeudi la CENI à organiser, avec eux, dans les vingt-quatre heures, une nouvelle réunion de concertation. Dans le cas contraire, ils prendront leur responsabilité devant Dieu, la nation et l’histoire.
Les candidats Fayulu, Mukwege, Mutamba, Ifoko, Anzuluni, Kukuni et Ngoy sont prêts à s’assumer si la CENI ne recadre pas le processus électoral. @Photo Droits tiers.
Le bureau Kadima va faire face à l’orage. Neuf candidats à la présidentielle refusent de se laisser entraîner dans un processus électoral biaisé. D’ailleurs, ils confirment leur rejet de l’offre de la CENI de signer le code de bonne conduite qui leur a été proposé parce qu’estimant qu’il y a plusieurs préalables à remplir avant d’aller aux urnes. Dans leur cahier des charges, Martin Fayulu, Denis Mukwege, Constant Mutamba, Floribert Anzuluni, Nkema Liloo, Marie-José Ifoko, Jean-Claude Baende, Théodore Ngoy et Seth Kikuni s’indignent de constater que les machines à voter utilisées lors des élections de 2018 dans la ville de Kinshasa et dans la province du Kongo central ont été envoyées à l’intérieur du pays pour soi-disant gagner du temps. “Mais en attendant, la fabrication d’autres machines se poursuit en Corée. Il en résulte que le déploiement des DEV dans le délai prévu est incertain pour organiser les élections le 20 décembre 2023”, ont-ils fait savoir.
Le retard est donc évident. Pour ces opposants, la CENI s’apprête à organiser un simulacre d’élections, aux conséquences dangereusement chaotiques, dont le bureau Kadima et le pouvoir en place assumeront seuls la grave responsabilité. En plus, le groupe de 9 relève l’exclusion intentionnelle de plusieurs Congolais du vote. Les signataires font allusion à cette partie de l’électorat vivant dans les territoires occupés par les forces obscures qui sera privé de son droit fondamental d’élire et d’être dirigé par un président régulièrement élu, avec pour conséquences la consécration tacite et insidieuse de la balkanisation ainsi que la privation de l’un ou l’autre candidat président de la République d’un pourcentage important de l’électorat qui aurait pu lui permettre de faire la différence.
– Des irrégularités inadmissibles –
Des reproches pleuvent sur la manière dont la CENI organise les scrutins. En dehors du retard pris dans le déploiement des matériels de vote, elle est indexée sur le problème des cartes d’électeurs dont la plupart sont illisibles. Une entorse à la loi qui ne passe pas. Pourtant, l’article 6, alinéa 1 de la loi électorale dispose que “la qualité d’électeur est constatée par l’inscription sur la liste des électeurs et la détention d’une carte d’électeur ou en cas de perte de celle-ci, d’un duplicata délivré par la Commission électorale nationale indépendante”. Cependant, à la suite de l’utilisation d’une imprimante thermique, pour l’impression de cartes d’électeurs, les cartes de millions d’électeurs sont illisibles. Malheureusement, les challengers de Tshisekedi constatent que les duplicatas sont délivrés uniquement à quelques personnes, au niveau des antennes de la CENI, situées à des centaines de kilomètres moyennant un paiement indu.
Pire, la protection des candidats n’est pas assurée. Preuve que le théâtre que joue Kadima est une vaste blague. Ainsi, ils rappellent à l’organe technique que “la régularité consiste, notamment, à respecter et/ou à faire respecter strictement les règles relatives à la qualité d’électeur, au fichier électoral”, à la cartographie électorale, aux opérations de vote, par le déploiement préalable et effectif du DEV, à l’égale protection de tous les candidats présidents de la République et à leur égal traitement dans les médias audiovisuels.
– Pas toujours de cartographie –
Jusqu’à ce jour, la cartographie électorale n’a pas été publiée par la CENI. Elle devait être faite trente jours au plus tard avant le début de la campagne en tenant compte du nombre des inscrits. Loin de publier la cartographie dans les conditions prévues par les dispositions de l’article 47 bis de la loi électorale, le bureau Kadima s’est contenté pour la forme, fustigent les 9, de remettre un atlas électoral d’une province à chaque candidat. Cela accroît encore de suspicions. Les signataires soulignent ensuite que l’alinéa 2 du même article dispose que « la Commission électorale nationale indépendante publie, par centre de vote, la liste provisoire des électeurs avec indication du bureau de vote ». L’article 8 alinéa I enjoint la CENI à publier la liste définitive des électeurs par centre de vote, avec indication de bureau de vote, trente jours avant la campagne électorale. Bizarrement, la Centrale électorale n’a pas assuré cette régularité, en violation intentionnelle de la Constitution et de la loi électorale. Pire, disent-ils, la question de la fiabilité du fichier électoral reste toujours pendante, étant donné qu’il s’est ajouté le flou créé par l’opération de délivrance des duplicatas aux électeurs dont les cartes ne sont plus lisibles. Pour le groupe de 9, cette opération confirme que le chiffre d’enrôlés de 43 955 181 annoncé par la CENI ne peut pas se vérifier, car plusieurs enrôlés, demandeurs de duplicatas, ne trouvent pas leurs noms sur la base des données. Ainsi, les opposants expliquent que les éléments constitutifs d’un électeur dans un fichier électoral sont les données textuelles et les données biométriques, notamment, l’identité, la photo, l’iris et l’empreinte digitale. Malheureusement, la récupération des omis ne se fait qu’avec les données textuelles dans les centres chargés de délivrer les duplicatas. Une fois de plus, d’après eux, la CENI a esquivé cette grave préoccupation soulevée par les candidats présidents de la République.
Faute d’un accord dégagé sur les différents points soulevés lors de la précédente réunion sur la question de l’organisation effective des élections le 20 décembre 2023, les 9 candidats à la présidentielle pressent la Commission électorale à rectifier le tir. Faute de quoi, ils vont se prendre en charge. En ce moment-là, le pouvoir et la CENI assumeront la responsabilité du chaos.