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Inondations, Michel Uyumbu : « Kinshasa ne dispose pas d’un réseau de drainage »

Effroi et stupeur, émoi et frayeur. Après chaque pluie, la capitale congolaise est honteusement submergée par des inondations qui dégradent la chaussée et envahissent les zones d’habitation.
La dernière pluie qui s’est abattue sur Kinshasa, a causé une centaine de morts et plusieurs dégâts matériels.

Michel Uyumbu, ingénieur et président de la corporation nationale des ingénieurs BTP @Photo Droits tiers.

publié le 20 décembre 2022 à 05:27:00

Interviewé par Ouragan.cd, l’ingénieur Michel Uyumbu, président de la corporation nationale des ingénieurs de bâtiments et travaux publics, explique ci-dessous, les causes des inondations dans la capitale.

Ouragan.cd : La ville de Kinshasa était inondée par les eaux de pluie dans la nuit de lundi à mardi 13 décembre 2022, causant mort d’hommes et d’énormes dégâts matériels. A votre avis, quelles sont les causes de ces inondations dans la capitale ?

Michel Uyumbu : Premièrement, j’exprime toute ma compassion aux personnes qui ont perdu les leurs. Il y a eu une centaine de morts. Des morts de trop alors que ces personnes pouvaient être encore utiles pour le pays. C’est vraiment déplorable.
Le problème des inondations dans le pays est très complexe, je ne voudrais pas faire de la démagogie pour dire que la solution immédiate est là et le problème sera réglé par un coup de bâton magique, non. Une ville qui a autant de millions d’habitants comme Kinshasa, la première chose, c’est d’avoir un réseau de drainage, c’est-à-dire un ensemble des ouvrages qui vont collecter des eaux et les acheminer vers les exécutoires naturels que sont les rivières.

La ville de Kinshasa est dans une situation très dramatique, les communes qui ont été construites avant l’indépendance, disposaient en son temps d’un réseau de drainage, à l’exemple de la commune de la Gombe, où il y a un réseau qui peut recueillir les eaux et les évacuer facilement. Malheureusement dans d’autres communes, ces réseaux ne sont plus fonctionnels parce qu’on y a construit dessus et ils sont bouchés. Dans les quartiers nouvellement construits, il n’y a pas de réseaux de drainage et la prise en charge des eaux de pluie est impossible. En plus de cela, les gens ont construit dans les zones “non aedificandi”.

Est-ce que le pays dispose d’un code de construction et d’urbanisme ?

Non, il n’y en a pas. Le pays ne dispose donc ni d’un code de construction, moins encore celui d’urbanisme. Il faudrait qu’il y ait une grande production réglementaire mais aussi une volonté politique pour mettre cela en application. Les gens construisent sur les collecteurs sans être interpellés, ce n’est pas normal. Quelqu’un se réveille un bon matin et décide de quitter ses limites parcellaires pour entrer sur le domaine public jusqu’à 3 ou 4 mètres. On doit cesser avec ça, on doit sentir l’autorité de l’État.

Au stade actuel, est-il possible d’urbaniser à nouveau cette ville qui est en même temps la capitale ?

Oui, c’est toujours possible. Il faut une volonté politique pour le faire. Avant qu’on ne dispose de tous les documents d’urbanisme dont on a besoin, il faut que nous ayons d’abord la volonté politique pour mieux faire les choses.

Quel est le rôle du réseau d’assainissement de Kinshasa ?

Nous n’avons pas un réseau de drainage. Vous avez une ville comme Paris avec une population qui est la moitié de Kinshasa, mais qui a un réseau d’égouts qui peut vous faire autour de 2700 kilomètres de manière souterraine à tel point que quand vous passez après la pluie, c’est comme s’il n’y avait rien eu. En dépit de tous les défis que nous avons, l’un des plus grands, c’est le changement climatique, mais malheureusement nous n’avons même pas analysé les effets de changement climatique pour trouver les mesures d’atténuation.

Pouvez-vous nous donner quelques causes à la base des effondrements de la plupart des immeubles à Kinshasa ?

Ça, c’est un autre problème très complexe. Vous savez pour qu’un bâtiment se mette debout, il y a plusieurs acteurs. Ka réalité est la même pour un pont, une route, un immeuble ainsi de suite. Il y a les auteurs du projet, les exécuteurs du projet, il y a aussi ceux qui contrôlent l’exécution du projet, voilà les différents acteurs. Donc, il peut y avoir un problème au niveau des études, soit au niveau de la mise en œuvre ou même au niveau de contrôle. Pour moi, les causes sont multiples. Mais à la base de tout ça, il faut savoir que c’est le désordre dans le secteur qui constitue une cause majeure. Personne ne connaît les acteurs du secteur et personne ne certifie leurs compétences. Chacun avec son argent peut construire n’importe comment, n’importe où et avec qu’il veut. Il faudrait que les acteurs du secteur soient identifiés et que les compétences par acteur soient certifiées. Il peut y avoir des accidents isolés. Ailleurs, ça arrive aussi qu’il il y ait effondrement, mais ce qui se passe chez nous, j’appelle ça la compétition nationale des effondrements d’immeubles.

Et les permis ou autorisations de construire sont-ils octroyés sur base de quels critères ?

A mon avis, les permis de construire sont en train de résoudre un problème, celui de taxe, c’est-à-dire que l’argent afflue uniquement dans les caisses de l’État mais cela ne résout pas le problème de fond qui est celui de la sécurité des occupants de bâtiments ou la stabilité de l’ouvrage. Le plus important, on veut être sûr que l’ouvrage, le bâtiment qui est en train d’être construit, respecte la réglementation urbanistique. Il ne va pas constituer un danger pour le voisin, il ne va pas s’effondrer ou constituer un problème pour l’environnement.

On ne peut pas avoir des parcelles à destination d’habitation dans une zone industrielle comme la commune de Limete côté industriel. Mais malheureusement, vous trouverez les gens qui se sont installés là et je ne sais pas s’ils ont tous obtenu leurs permis de construire. Le permis de construire, c’est pour vérifier la validité d’une concession par rapport à la réglementation et par rapport au temps.Tel qu’il est délivré aujourd’hui, il ne remplit pas toutes les conditions. On doit prendre en compte tous les aspects (urbanistiques, architecturaux et même sécuritaires).

Les ingénieurs à la base des constructions anarchiques sont-ils sanctionnés ?

Je ne pense pas que tous ces dérapages là sont l’oeuvre des ingénieurs. Depuis un certain temps, je m’intéresse à toutes les constructions qui s’effondrent mais je n’ai pas vu un seul immeuble où un ingénieur connu était à l’oeuvre. C’est soit une affaire qui a commencé par un ingénieur et qui se termine par un maçon de la famille, les amis et connaissances. C’est la preuve que le secteur est désordonné et il faut qu’on mette de l’ordre.

Que faites-vous au sein de votre corporation pour pousser l’Etat à réglementer le secteur des bâtiments et travaux publics ?

D’abord, ce n’est pas à nous de réglementer le secteur, c’est à l’État de le faire. Ensuite nous, nous ne pouvons qu’apporter notre appui pour la réglementation du secteur et c’est ce que nous essayons de faire. Nous allons vers les politiques pour leur montrer l’importance de la réglementation et nous les sensibilisons. Dernièrement, j’étais à l’Expobéton. J’ai fait un exposé sur ça. Depuis 2020, on nous a transmis la copie d’un projet de Code de construction et un Code d’urbanisme pour que nous puissions apporter nos suggestions et amendements, nous l’avons fait et on devait valider le document pour qu’il soit déposé au Parlement et voté en une loi. Mais malheureusement, la validation n’a jamais eu lieu au niveau du ministère de l’Urbanisme et habitat. Et c’est depuis deux ans que nous attendons sa validation, c’est un problème urgent mais nous ne savons pas pourquoi ça traîne.

Votre conclusion ?

J’appelle à la conscience de tout le monde : dirigeants et population. Je dis quand le bâtiment va, c’est-à-dire que tout va bien très bien. Quand vous débarquez dans un pays, les premiers contacts que vous avez, sont des infrastructures. Vous êtes dans un aéroport en transit, ce que vous allez retenir, c’est ce que vous aurez vu (les infrastructures aéroportuaires), donc c’est un domaine de développement du pays. Mais, nous ne comprenons pas ce qui se passe chez nous. C’est un domaine clé et complexe, mais chez nous, tout le monde peut le gérer. Je ne sais pas quel jour on nommera un ingénieur au ministère de la Justice ou à la Santé. Je ne sais pas si un jour on nommera un ingénieur à l’Urbanisme. C’est un domaine très technique et très complexe pour lequel celui qui est à la tête s’il est vraiment de cette formation là, il pourra contribuer plus efficacement.

Propos recueillis par Richard Ntumba
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