Poids de l’âge. Accumulation des conflits régionaux notamment avec la République démocratique du Congo. Et surtout, l’émergence au Rwanda et en Ouganda d’une nouvelle génération d’officiers supérieurs suffisamment formés dans les grandes académies militaires du monde, des nouveautés qui ont énormément contribué à faire évoluer la politique diplomatique des deux États vis-à-vis de la République démocratique du Congo.
Paul Kagame ( Rwanda) et Yoweri Museveni ( Ouganda ) se sont coalisés pour humilier la République démocratique du Congo @Photo Droits tiers
Longtemps considérés comme des États prédateurs de la RDC et auteurs de plusieurs massacres perpétrés dans l’Est du pays, les deux hommes (Kagame et Museveni) voudraient baliser le terrain aux plus jeunes. Leurs successeurs seront tous des militaires. Peut-être même leurs fils respectifs. Le général Muhoozi Kainerugaba, fils du président ougandais Yoweri Museveni et commandant de l’armée de terre ougandaise a déjà annoncé sa retraite militaire à l’âge de 47 ans, depuis le mardi 8 mars 2022. Toutes les sources de la société civile ougandaise soupçonnent Museveni de préparer son fils à lui succéder à la présidence de la République. Du côté du Rwanda, le sujet reste un peu tabou. Même l’ancien chef d’État-major James Kabarebe passé ministre de la Défense avant d’être remplacé par le général Albert Murasira, issu comme lui des rangs de la rébellion du Front patriotique rwandais (FPR) qui mit fin au génocide de 1994 en s’emparant de Kigali puis du reste du pays, n’est plus cité dans la course. Ce que l’on sait est qu’un fils du président Paul Kagame a été nommé au conseil d’administration de l’organe de développement du Rwanda, RDB. Ivan Kagame, 30 ans, est l’aîné d’une fratrie de quatre enfants – trois fils et une fille. Ce dernier serait le plus porté à la fonction suprême, même si rien d’officiel ne l’indique jusqu’à présent. La guerre lancée depuis le lundi 28 mars 2022, même si elle ne s’intensifie pas encore, est un signe à prendre au sérieux.
Kagame et Museveni n’écoutent que le langage des armes
Placée sous le commandement militaire du Kenya, la force militaire attendue de la Communauté des États de l’Afrique de l’Est (EAC) devrait être opérationnelle dans les prochaines semaines, dit-on. La taille de cette force, la durée des opérations et d’autres informations opérationnelles feront l’objet d’une communication ultérieure spécifique. Le Rwanda et l’Ouganda qui étranglent la RDC depuis des décennies “ne lâcheront pas par de simples protestations, dénonciations et jérémiades”, a exposé l’Abbé Jerry Lokela de Lodja. Il n’est pas besoin de rassembler et de documenter les preuves de cette volonté de balkanisation de nos agresseurs, dit-il, car personne ne l’ignore. Au-delà des marches spectaculaires et des discussions dans les médias, il est temps qu’on réfléchisse davantage sur cette question principale aujourd’hui. “Nous devrons nous organiser davantage, nous mobiliser en acceptant de consentir les sacrifices, les privations et les pertes indispensables à la noble lutte pour sauver cette nation en déconfiture”, conseille le prêtre catholique.
Le député national Alphonse Ngoyi Kasanji soutient fermement l’idée d’une guerre généralisée face aux agresseurs. “N’ayons pas peur de faire la guerre si les négociations sont difficiles. Nous allons gagner la guerre avec la mobilisation générale Mr le Président. La guerre se mène, se gagne ou se perde mais il faut la mener pour établir notre dignité. Les Congolais, nous ne sommes pas les femmes du Rwanda et de l’Ouganda. Nous allons gagner cette guerre par la guerre”, motive-t-il. Cette guerre meurtrière a durablement et profondément modifié la carte géographique et politique et érodé l’économie du pays.
Le lac Kivu est aujourd’hui inondé et débordé des larmes des populations de l’Est soumises au carnage et à l’errance qu’aucun autre peuple n’a connus ces trois dernières décennies. “Les Congolais doivent s’assumer dans l’unité, avec intelligence, courage et détermination pour restaurer l’intégrité de leur territoire et assurer la sécurité et la paix de nos frères et sœurs de l’Est”, formule ainsi un acteur de la société civile. Dans ce contexte, la conjugaison de la guerre semble inéluctable face aux attitudes d’inconfiance exprimées tout au long des vingt-cinq dernières années par le Rwanda et l’Ouganda.